Dans un contexte mondialisé, la question des échanges commerciaux internationaux est centrale. Juridiquement, la problématique principale de ce sujet est celle de la loi à appliquer aux obligations contractuelles qui naissent dans un contexte international. L’Union Européenne a d’ailleurs instauré une méthode de détermination de la loi applicable dès la Convention de Rome du 19 juin 1980.
En 2008, pour les contrats conclus à compter du 17 décembre 2009, un nouveau règlement sur la loi applicable aux obligations contractuelles a été adopté : il s’agit du règlement Rome 1.
En tant que professionnel, si vous contractez avec des entités dans d’autres pays de l’Union, vous vous êtes certainement déjà interrogé sur la loi à appliquer en cas de conflit. Pour déterminer les règles en matière de loi applicable, il convient de se pencher sur les apports du règlement Rome 1 en la matière.
Règlement Rome 1 : les principes qui ne changent pas
Certains principes en matière de détermination de la loi applicable aux obligations contractuelles dans le cadre de contrats internationaux n’ont pas été changés par le règlement Rome 1.
Le champ d’application
Il demeure inchangé. Le règlement Rome 1 “s’applique, dans des situations comportant un conflit de lois, aux obligations contractuelles relevant de la matière civile et commerciale”.
Le principe de la liberté de choix
L’article 3 (1) du règlement Rome 1, intitulé “Liberté de choix” reprend ce principe fondamental : “le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Le choix est exprès ou résulte de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat.”
Ainsi, deux entreprises qui concluent un contrat, par exemple une société française qui conclut un contrat de fourniture de matériel avec une société polonaise, peuvent choisir contractuellement la loi qui sera appliquée en cas de conflit. Généralement, la loi choisie est celle d’un des deux pays (dans l’exemple loi française ou loi polonaise). Toutefois, le règlement Rome 1, et avant ça, la Convention de Rome, permet aux parties de choisir d’appliquer la loi d’un pays sans lien objectif avec la situation géographique des parties.
Les entreprises française et polonaise peuvent donc décider que la loi italienne s’appliquera en cas de conflit dans le cadre du contrat de fourniture de matériel qu’elles ont conclu.
Il est également possible pour les parties de choisir d’appliquer la loi nationale d’un pays situé en dehors de l’Union Européenne.
La détermination de la loi applicable en l’absence de choix des parties
Le règlement Rome 1 conserve la méthode de la Convention de Rome pour déterminer la loi applicable lorsque les parties ne l’ont pas désignée contractuellement :
- Le règlement Rome 1 donne des règles à appliquer dans certains domaines spécifiques. Par exemple, dans le cadre d’un contrat en matière immobilière, en l’absence de choix de la loi applicable par les parties, la loi applicable est celle du pays de situation de l’immeuble ;
- À défaut, lorsque le contrat présente des liens manifestement plus étroits avec un pays, le règlement Rome 1 indique que la loi de ce pays s’appliquera ;
- Si les circonstances ne permettent pas d’établir de liens manifestement plus étroits avec un pays en particulier, la loi du pays de la partie qui fournit la prestation caractéristique du contrat s’applique ;
- Enfin, si les critères précédents ne permettent pas de déterminer la loi applicable, il faudra déterminer le pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits, et appliquer la loi nationale.
Règlement Rome 1 : les apports de ce règlement
Le règlement Rome apporte de nouveaux éléments en matière de détermination de la loi applicable.
La notion de “lois de police”
Cette notion était déjà présente dans la Convention de Rome. Le règlement Rome 1 réitère son importance en indiquant que “les dispositions du présent règlement ne pourront porter atteinte à l’application des lois de police du juge saisi”.
L’apport du règlement Rome 1 réside dans la revue de la définition des lois de police. Le règlement Rome 1 définit les lois de police comme tel :
“Une loi de police est une disposition impérative dont le respect est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde de ses intérêts public, tels que son organisation politique, sociale ou économique, au point d’en exiger l’application à toute situation entrant dans son champ d’application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat d’après le présent règlement”.
En d’autres termes, une loi de police désigne des règles applicables en toute circonstance, auxquelles il n’est pas possible de déroger, y compris dans un contexte international.
Un apport principal de Rome 1 est l’extension de la notion de loi de police aux principes communautaires. En effet, les lois de police ne sont plus uniquement des lois nationales, le droit communautaire comporte également des dispositions auxquelles il n’est pas possible de déroger contractuellement.
L’ordre public international
Le règlement Rome 1 permet également au juge de contrôler l’application d’une loi a posteriori.
Cela signifie qu’il est possible que les parties aient choisi une loi à appliquer en cas de conflit, que le choix respecte toutes les conditions établies par le règlement et soit donc valable, mais que les effets de l’application de cette loi étant contraires à l’ordre public international, le juge puisse décider d’écarter l'application de la loi choisie.
Des cas supplémentaires explicités
Nous l’avons vu précédemment, le règlement Rome 1 comme la Convention de Rome précédemment, dans certains cas particuliers, indique quelle loi doit être appliquée en l’absence de choix par les parties.
Ce que le règlement Rome 1 ajoute, ce sont des cas supplémentaires.
La méthode du règlement Rome 1 de détermination de la loi applicable résumée
En bref, la méthode indiquée par le règlement Rome 1 pour déterminer la loi applicable en cas de conflit entre deux parties de deux pays de l’Union Européenne différents est la suivante :
- Dans un premier temps, il convient de se demander si des lois de police sont applicables à cette situation contractuelle. Si tel est le cas, elles doivent être appliquées ;
- En l’absence de loi de police, les parties ont-elle choisi contractuellement la loi nationale devant s’appliquer ? Si tel est le cas, il convient d’appliquer cette loi.
- En l’absence de loi contractuellement choisie, le règlement nous indique-t-il quelle est la loi à appliquer dans cette situation particulière ? Si tel est le cas, il convient d’appliquer cette loi.
- En l’absence de loi explicitement indiquée par le règlement Rome 1, il convient d’analyser les liens manifestement étroits avec un pays, ou à défaut, le pays de la prestation caractéristique du contrat, ou à défaut les liens les plus étroits avec un pays plutôt que l’autre, pour déterminer la loi applicable.
- Une fois la loi applicable déterminée, si le juge identifie que les effets sont contraires à l'ordre public international, il pourra l’écarter.
La loi applicable en cas de conflit dans le cadre de l’exécution d’un contrat international peut s’avérer être un élément primordial, qu’il convient de bien négocier. Un avocat spécialisé en droit international peut vous accompagner dès la rédaction d’un contrat international pour anticiper ces enjeux, mais peut également vous accompagner en cas de conflit pour vous aider à déterminer la loi applicable.
- La Convention de Rome a édicté des règles en matière de détermination de la loi applicable en cas de contrat international.
- Le règlement Rome 1 a confirmé et révisé ces règles.
- Le principe est celui de la liberté de choix des parties mais il existe de nombreuses exceptions.
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