Pour vendre ou louer leurs biens immobiliers, il est d’usage pour les propriétaires de faire appel aux services d’un agent immobilier. Pour ce faire, un mandat immobilier est conclu entre les deux parties. Le propriétaire devient ainsi le mandant de l’agent immobilier et ce dernier devient mandataire du propriétaire. Ce contrat va déterminer la mission de l’agent (vendre ou louer) et préciser les pouvoirs qui lui sont confiés. Celui-ci peut avoir une simple mission d’entremise ou dans des cas plus rares avoir la possibilité d’engager le propriétaire en signant des actes juridiques en son nom et pour son compte. Si l’agent immobilier n’exécute pas sa mission ou qu’il ne l’exécute pas correctement, sa responsabilité pourra être engagée par le propriétaire du bien ainsi que par l’acquéreur ou le locataire.
Tout en accomplissant sa mission selon les termes de son mandat, l’agent immobilier est tenu de respecter plusieurs règles. À commencer par la loi Hoguet, qui encadre la profession d’agent immobilier, mais aussi certaines obligations issues du droit de la consommation. À défaut, il pourra voir sa responsabilité civile et/ou sa responsabilité pénale engagée.
La responsabilité de l'agent immobilier à l'égard du propriétaire du bien
Le propriétaire d'un bien qui a mandaté un agent immobilier peut engager la responsabilité de ce professionnel dans trois hypothèses :
- parce que le professionnel n’a pas exécuté sa mission ou qu’il ne l’a pas exécutée correctement ;
- parce que le professionnel a rédigé un acte juridique qui se révèle être irrégulier ;
- parce que le professionnel manque à son obligation de conseil envers son mandant.
Responsabilité pour mauvaise exécution de sa mission
L’agent immobilier est mandaté pour l’accomplissement d’une opération sur un bien immobilier. Qu’il s’agisse d’une vente ou d’une location de bien, cette opération reste un but à atteindre pour l’agent, néanmoins la signature du mandat ne l’engage pas à exécuter cette opération de manière certaine. En droit, on dit que l’agent immobilier a une obligation de moyens, c’est-à-dire qu’il doit tout mettre en œuvre pour arriver à réaliser sa mission, mais ne saurait être tenu pour responsable en cas d’échec à vendre ou à louer un bien.
En revanche, le propriétaire pourra toujours reprocher une faute commise par l’agent dans le cadre de l’exercice de sa mission ou pour ne pas avoir tout mis en oeuvre pour la réaliser.
En ne respectant pas (ou en respectant mal) une obligation issue du contrat de mandat immobilier, la responsabilité engagée est dite contractuelle.
Pour engager cette responsabilité, le propriétaire ou toute autre personne réclamant réparation devra réunir trois éléments de preuve :
- une faute, résultant de la mauvaise exécution (ou de l’inexécution) par l’agent immobilier de ses obligations contractuelles ;
- un dommage ;
- un lien de causalité, c’est à dire le fait que le dommage résulte de la faute commise.
L’agent immobilier pourra éventuellement s'exonérer de toute responsabilité en démontrant la survenance d’un cas de force majeure. Selon l’article 1218 (créé par la réforme de 2016) , “il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur”.
Les juges vont déterminer si oui ou non l’agent immobilier est responsable d’un manquement contractuel. La réalisation d’une faute sera appréciée au cas par cas par les juges au regard du mandat qui aura été signé. Toutefois, des exemples de comportements jugés fautifs peuvent être énoncés.
Par exemple, les juges ont considéré que l’agent immobilier qui ne procède pas aux vérifications auxquelles il est tenu par la loi, commet une faute et engage sa responsabilité contractuelle.
Il se doit par exemple de vérifier que les futurs locataires d’un bien immobilier sont solvables. Lors de la vérification de la solvabilité d’un locataire, l’agent immobilier doit se montrer minutieux. En effet, la seule vérification des capacités financières du locataire ne suffit pas. Il doit également s’assurer que le locataire paiera régulièrement ses loyers au propriétaire. Ainsi, peut être sanctionné l’agent immobilier qui ne procède qu’à la vérification des bulletins de paie du futur locataire, sans lui demander ses quittances de loyer. La vérification de ces derniers documents permet de vérifier que le locataire est sérieux dans le respect de ses obligations et qu’il a les moyens de payer le propriétaire tous les mois.
De même, l’agent immobilier ayant une mission de gestion locative pourra voir sa responsabilité engagée s’il réagi tardivement face aux premiers impayés du locataire. En effet, l’agent immobilier doit être proactif dans sa mission de gestion, à défaut sa responsabilité pourra être engagée.
Pourra également être sanctionné l’agent immobilier qui n’informerait pas l’acheteur des activités ne pouvant être exercées dans un local commercial. C’est le cas lorsqu’un acheteur profane, investit dans l’achat d’un local commercial avec pour projet d’y développer une activité de restauration, mais que l’agent immobilier professionnel et au fait de la réglementation applicable, n'informe pas l'acheteur du fait que le local en question ne permet pas l’exploitation d’une activité de restauration
Enfin, l’agent immobilier qui souhaite abandonner sa mission doit le faire savoir au propriétaire. S’il ne le fait pas, il commet une inexécution contractuelle et donc une faute.
Responsabilité pour la mauvaise réalisation d'un acte juridique
L'agent immobilier peut se voir confier une mission qui comprend, d’une part, la recherche d'un acheteur ou d'un locataire et, d’autre part, la réalisation des actes juridiques nécessaires à la réalisation de l’opération (rédaction d’un compromis de vente dans le cadre d’une vente (l’acte définitif étant rédigé par les notaires des parties), ou encore le contrat de location dans le cadre d’une location). Bien entendu, lorsque l’agent rédige un acte juridique pour le compte du propriétaire, il s'engage à ce que l'acte soit valide juridiquement. Ainsi, si l’acte s’avère irrégulier, la responsabilité de l’agent immobilier pourra être engagée.
Or, il arrive souvent que les agents immobiliers ne respectent pas les conditions de formes imposées par la loi (une mention écrite, la présence d’une signature, etc.). Le non-respect des conditions de forme a pour conséquence de rendre l’acte non valide. Le défaut de validité d’un acte juridique porte nécessairement atteinte aux intérêts du propriétaire, qui voit l’opération de vente ou de location annulée.
En outre, l’agent immobilier devra s’assurer que l’acte en lui-même peut être réalisé. À ce titre, il devra par exemple vérifier que les parties sont juridiquement capables de signer l’acte en question et qu’elles en ont le pouvoir (les majeurs protégés et les mineurs ne peuvent signer librement des actes de vente).
Responsabilité pour manquement à son devoir de conseil
L'agent immobilier est tenu d’un devoir de conseil vis-à-vis du propriétaire du bien immobilier. Ce devoir de conseil est assez large et peut aller jusqu'à la mise en garde contre le manque de pertinence d'une opération.
A par exemple été engagée la responsabilité d’un agent immobilier qui n’avait pas déconseillé au propriétaire d’un bien de le louer à une personne âgée aux faibles revenus. L’agent immobilier aurait dû avertir le propriétaire que le fait de choisir ce locataire allait potentiellement gêner la future vente du bien. En effet, une personne âgée aux faibles revenus est protégée par la loi ce qui rend son congédiement beaucoup plus complexe.
La responsabilité de l'agent immobilier à l'égard de l'acquéreur ou du locataire
Le mandat immobilier n'engage que le propriétaire du bien immobilier et l'agent immobilier. Cependant, les juges ont considéré que le tiers au mandat immobilier, à savoir le futur acquéreur ou locataire, pouvait être impacté par un comportement de l’agent immobilier. Ils admettent donc que l’agent immobilier voit sa responsabilité engagée par l’acquéreur ou le locataire dans trois hypothèses :
- lorsque l'agent immobilier a commis un délit ou un quasi-délit ;
- lorsque l'agent immobilier commet un dépassement de pouvoirs :
- lorsque l'agent immobilier ne respecte pas son devoir de conseil.
La commission d'un délit ou d'un quasi-délit dans l'exercice de sa mission
L'agent immobilier qui commet un délit durant l'exercice de sa mission, provoquant un dommage à un tiers, engage sa responsabilité. Il s’agit d’une faute intentionnelle.
La responsabilité de l’agent immobilier sera également engagée si celui-ci commet un quasi-délit durant l’exercice de sa mission. Un quasi-délit est une faute non intentionnelle qui ne peut être excusée et qui cause un dommage aux tiers. Par exemple, commet un quasi-délit l’agent immobilier qui oublie de prévenir les futurs acquéreurs de la présence de parasites dans le bien immobilier.
L'agent immobilier ne pourra pas être exonéré de l'engagement de sa responsabilité en démontrant qu'il a agi sur les ordres de son mandant (le propriétaire).
L’agent immobilier qui ne vérifie pas que son mandant a bien la capacité de vendre ou de louer son bien pourra voir sa responsabilité engagée. Si la vente du bien ne se réalise pas à cause de l’absence de capacité du mandant à réaliser l’opération, l’agent immobilier commet une faute en n’ayant pas vérifié cet élément. Cette faute cause un préjudice à l’acheteur qui perd ainsi l’espoir de devenir propriétaire et qui s’est investi dans une opération juridique qui se solde par un échec.
Le dépassement de pouvoir
Le dépassement de pouvoir se matérialise lorsque le mandataire ne respecte pas le cadre de sa mission. Dans le cadre d’un mandat immobilier, l’agent peut avoir différents niveaux de pouvoir dans la réalisation de sa mission.
Il peut être chargé de vendre ou de louer le bien en question, mais également de réaliser des actes au nom et pour le compte du propriétaire (signature d’un compromis). Si l’agent immobilier réalise un acte juridique alors qu’un tel pouvoir ne lui a pas été confié dans le mandat, il commet une faute.
Manquement à son devoir de conseil
L’agent immobilier est tenu d’un devoir de conseil envers son mandant, mais également envers le potentiel acquéreur ou locataire du bien. Il se doit donc de lui communiquer toutes les informations relatives au bien. C’est notamment le cas des diverses informations concernant l’état du bien (humidité anormale, présence de nuisibles). À défaut, il engagerait sa responsabilité.
Comme pour le devoir de conseil vis-à-vis du propriétaire, celui-ci est large. Il englobe donc le fait de déconseiller à l’acquéreur d’acheter un bien qui ne correspondrait pas à l’usage qu’il souhaite en faire. Ainsi engagerait sa responsabilité l’agent immobilier qui ne préviendrait pas un acquéreur que le bien immobilier en question n’est pas à usage commercial. Pareillement, manque à son devoir de conseil l’agent immobilier qui ne prévient pas les acquéreurs que les travaux qu’ils envisagent ne pourront être réalisés lorsque l’immeuble se situe dans une zone protégée.
La responsabilité pénale de l'agent immobilier
La profession d’agent immobilier est régie par de nombreuses réglementations dont le manquement peut conduire à l'engagement de la responsabilité pénale de l’agent. Ainsi, l'agent immobilier est tenu de respecter les règles du droit de la consommation propre à la publicité mensongère. S'il rédige une annonce immobilière qui contrevient à ces règles, sa responsabilité pénale pourra être engagée.
Pareillement, la responsabilité pénale d'un agent immobilier pourra être mise en jeu si le professionnel ne respecte pas les règles contenues dans la loi Carrez. L'agent immobilier peut en effet être mandaté pour réaliser les métrages du bien immobilier en plus de sa mission de vente ou de location.
La perception de la rémunération de l’agent immobilier est encadrée par la loi. Ainsi, l’agent immobilier ne peut percevoir une quelconque commission s’il ne peut justifier d’un mandat écrit avant de commencer à effectuer sa mission. Il doit également attendre que l’acte juridique qui matérialise l’achat ou la location soit effectué par les parties. Par exemple, dans le cadre d’une vente, l’agent immobilier ne pourra percevoir sa commission qu’après que les parties aient signé le contrat de vente chez le notaire. La perception illicite de la commission engage la responsabilité pénale de l’agent immobilier qui pourra être condamné à deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
Enfin, comme toute personne, l'agent immobilier peut voir sa responsabilité pénale engagée s'il commet des infractions pénales telles que le détournement de fonds, l'abus de confiance ou encore l’escroquerie durant sa mission.
L’agent immobilier peut voir sa responsabilité engagée dans de nombreuses hypothèses. Ce professionnel doit respecter une législation spécifique à son secteur d’activité et aux agences immobilières, tout en étant certain de respecter les obligations issues de son mandat immobilier. Il est essentiel pour l’agent immobilier, qui voit sa responsabilité engagée, de demander l’assistance d’un avocat. En effet, ce professionnel pourra le guider tout au long de la procédure et défendre au mieux ses intérêts.