Comment un créancier peut-il se faire payer lorsqu'il a connaissance de l'effondrement, de la faillite d'un de ses débiteurs ? Il doit impérativement déclarer sa créance. Lorsqu'un débiteur rencontre des difficultés financières, il peut faire l'objet d'une procédure collective : sauvegarde judiciaire, redressement judiciaire, liquidation judiciaire.
Cette dernière vise à déterminer le passif social du débiteur. Elle entraîne la suspension des poursuites individuelles et prohibe l'utilisation des voies d'exécution classiques par les créanciers. La déclaration de créance est la procédure par laquelle le créancier déclare les créances qu'il détient à l'encontre du débiteur défaillant.
Ce document essentiel a connu une récente modification par l'ordonnance du 12 mars 2014 entrée en vigueur le 1er juillet 2014.
La déclaration de créance doit être effectuée conformément aux nombreuses exigences légales (I), sous peine pour le créancier de courir d'importants risques (II).
Une déclaration de créance rigoureusement encadrée
Cette déclaration de créance obéit à des modalités spécifiques.
Quelle créance doit-on déclarer ?
Tout d'abord, en principe cette procédure s'applique à toute créance. Toutefois de nombreuses créances dérogent à cette obligation légale. S'agissant des créances nées antérieurement au jugement d'ouverture, sont notamment exclues les créances salariales. Concernant les créances nées postérieurement au jugement d'ouverture, elles sont exclues de cette procédure comme les créances alimentaires, les créances portant sur la fourniture d'une prestation au cours de la période d'observation, et les créances causées par le déroulement de la procédure.
Sous quelle forme déclarer ?
Les textes ne précisent pas les conditions de forme de la déclaration de créance.
Cependant la jurisprudence a précisé le régime. Ainsi l'envoi d'une lettre avec accusé de réception est fortement recommandé.
De plus, certains éléments essentiels doivent figurer dans cette déclaration. Elle doit contenir notamment le montant des créances dues ou à échoir au moment du jugement d'ouverture, la date d'échéance, la nature des garanties éventuelles dont la créance est assortie, les intérêts courus et arrêtés au jour du jugement d'ouverture, les modalités de calcul des intérêts dont le cours n'est pas arrêté, les accessoires, les dommages-intérêts, les pénalités. Sont également à joindre : les documents justificatifs, les copies des factures, les bons de commandes ou livraisons….
La déclaration de créance peut être effectuée par le créancier lui-même ou un mandataire dûment habilité, le préposé du créancier, ou encore un tiers (à condition que le créancier confirme par la suite). Elle est adressée au mandataire judiciaire dans le cadre de la sauvegarde judiciaire et du redressement judiciaire et au liquidateur en cas de liquidation judiciaire.
Le point le plus sensible concerne le délai dans lequel le créancier doit déclarer sa créance.
En principe, celle-ci doit intervenir dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture de la procédure collective au BODACC. Toutefois de très nombreuses exceptions sont prévues concernant les délais.
Une déclaration non conforme peut entraîner des conséquences préjudiciables pour le créancier.
Quels risques pour le créancier qui ne remplit pas ou remplit mal sa déclaration de créance ?
Le non-respect des délais légaux entraîne de facto la forclusion du créancier. Autrement dit, il ne peut plus être payé sauf exceptions. Il convient donc pour le créancier d'être vigilant.
En effet, le créancier peut bénéficier d'un relevé de forclusion sous certaines conditions (agir dans les six mois suivant la publication de la décision d'ouverture, justifier son retard par une raison non due à son fait, ou imputable au débiteur, adresser une requête au juge-commissaire dans le délai de 6 mois suivant la publication du jugement d'ouverture au BODACC).
Une autre alternative permet au créancier de rattraper son retard. L'alinéa 2 de l'article L622-24 du code de commerce prévoit que « lorsque le débiteur a porté une créance à la connaissance du mandataire judiciaire, il est présumé avoir agi pour le compte du créancier tant que celui-ci n’a pas adressé la déclaration de créance prévue au premier alinéa ». Ainsi, cette déclaration de créance à l'initiative du débiteur fait office de mention sur la liste de créances remise à l'administrateur et au mandataire judiciaire par le débiteur.
Le défaut de déclaration entraînait avant 2005 l'extinction des créances non déclarées. Cette solution a été abandonnée par la loi du 26 juillet 2005. Celle-ci prévoit à l'article L.622-26 code de commerce que les créanciers ne seront pas admis dans la répartition des dividendes, sauf si le juge commissaire les relève de cette forclusion.
De plus, cet article ajoute que « Les créances non déclarées régulièrement dans ces délais sont inopposables au débiteur pendant l’exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus. Pendant l’exécution du plan, elles sont également inopposables aux personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie.L’action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de six mois ». Les garants ne sont donc protégés qu'en cas de plan de sauvegarde.
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