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L’exécution provisoire de droit des jugements : comment obtenir sa suspension ?

Me Matthieu Chauveau
Écrit par Me Matthieu Chauveau. Avocat, spécialisé en droit des affaires
Relu par Clémence Bonnet.

Vous êtes partie à un procès et vous vous questionnez sur les règles d’exécution d’un jugement rendu en premier ressort ?

À la suite d’une décision de justice, il est normal de s’interroger sur les modalités d’exécution de celle-ci. Or, vous ne le savez peut-être pas, mais à la suite d’une réforme de la procédure civile en date du 11 décembre 2019, les règles applicables en matière d’exécution provisoire des décisions ont été modifiées.

Mais alors qu’est-ce que l’exécution provisoire ? Quels sont les changements apportés par la réforme de 2019 ? Comment est-il possible d’obtenir la suspension de cette exécution provisoire de droit ? Pourquoi est-il indispensable de se faire accompagner par un avocat spécialisé ?

Me Matthieu Chauveau, avocat spécialisé en droit des affaires, contentieux des affaires et droit commercial, décrypte pour vous le sujet de l’exécution provisoire de droit d’un jugement et vous explique comment obtenir sa suspension.

 

 

L’exécution provisoire : le principe

 

À la suite d’un procès, le juge va rendre une décision de justice, décision qui va devoir être exécutée par les parties.

L’exécution provisoire peut se définir comme la faculté que détient le gagnant d’un procès de pouvoir faire exécuter immédiatement le jugement rendu à l’encontre de la partie perdante.

La partie gagnante va bénéficier du fait que le jugement soit exécuté provisoirement et ceci malgré le principe de l’effet suspensif des voies de recours ordinaires ou bien de leur exercice (et notamment de l’appel).

En effet, l’article 539 du code de procédure civile relatif aux voies de recours précise que le délai de recours ainsi que le recours suspendent l’exécution d’un jugement rendu en première instance.

Mais qu’est-ce que cela veut dire ? Dans l'hypothèse où la partie qui a perdu le procès en première instance décide d’interjeter appel, alors, en principe, l’appel a pour effet de neutraliser de façon temporaire l’exécution provisoire de la décision de justice.

Toutefois, la réforme de 2019 a modifié les règles en consacrant l’exécution provisoire de droit des décisions rendues par les juridictions de première instance.

Ainsi, même si l’article 539 du code de procédure civile a maintenu le caractère suspensif de l’appel et de l’opposition comme principe, l’exécution provisoire de droit est devenu le principe.

 

La réforme de la procédure civile en 2019 : quels changements retenir ?

 

Le décret du 11 décembre 2019 est venu consacrer l’exécution provisoire des décisions de justice en tant que principe, inscrit au sein de l’article 514 du code de procédure civile qui dispose dorénavant que :

"[L]es décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement".

Désormais, l’ensemble des décisions rendues par les juridictions civiles (le tribunal judiciaire, le conseil de prudhommes, le tribunal de commerce ou encore le tribunal paritaire des baux ruraux) bénéficient automatiquement de l’exécution provisoire de plein droit.

La partie qui souhaite en bénéficier n’a donc plus besoin d’en faire la demande. Par exemple, le créancier détenteur d’un titre va pouvoir immédiatement recouvrir les sommes sans que le juge ait eu besoin de statuer sur ce point.

 

Les exceptions au principe de l’exécution provisoire de droit

 

Il existe toutefois des exceptions puisque dans certains cas précis, l’exécution provisoire reste facultative.

 

Les cas où l'exécution provisoire de droit est écartée par le juge

 

Ici, tout dépend de la volonté du juge qui conserve la faculté de prononcer (ou non) l’exécution provisoire. Ainsi, le juge peut tout à fait écarter (sauf dans les cas où cela lui est expressément interdit – cf. infra) l’application de l’exécution provisoire dans les cas où il estime qu’elle serait en réalité « incompatible avec la nature de l’affaire » (Art. 514-1 al. 1er du CPC). Cette condition s’apprécie in abstracto, c’est-à-dire, avec la nature de l’affaire et non au regard des circonstances de fait. Cette décision peut être prise par le juge lui-même qui va statuer d’office ou à la suite d’une demande d’une des parties au procès. Cette décision doit être motivée par le juge.

Mais alors, dans quelles situations l’exécution provisoire est incompatible avec la nature de l’affaire ?

Ici, le juge doit se demander s’ il prend le risque de rendre la situation irréversible en décidant de ne pas écarter l’exécution provisoire. Si la réponse à cette question est positive, alors le juge peut écarter l’application de l’exécution provisoire. C’est le cas notamment lorsqu’une décision de justice décide de la destruction d’un immeuble : l’exécution immédiate de cette décision pourrait être considérée comme étant incompatible avec la nature de l’affaire.

Mais cette faculté dont dispose le juge de ne pas appliquer l’exécution provisoire est toutefois limitée. Dans certaines situations, le juge ne peut pas exclure l’exécution provisoire de droit. Par application des dispositions de l’Article 514-1 alinéa 3 du Code de procédure civile, c’est le cas notamment dans le cadre d’une :

  • procédure de référé ;
  • décision ordonnant des mesures provisoires ;
  • décision ordonnant des mesures conservatoires ;
  • d’une ordonnance du juge de la mise en état qui accordent au créancier une provision.

 

Les cas où l'exécution provisoire de droit est écartée par la loi

 

La seconde exception est attachée à la loi puisque celle-ci a prévu des hypothèses où l’exécution provisoire reste facultative.

Ainsi, dans certaines matières civiles, l’état du droit est resté le même post-réforme et l’exécution provisoire a ainsi conservé son caractère facultatif. Les matières dans lesquelles les décisions ne sont pas exécutoires de droit sont les décisions statuant :

  • sur la nationalité ;
  • sur la rectification ou l’annulation judiciaire d’actes d’état civil ;
  • sur le choix du prénom à la suite d’une déclaration de naissance ;
  • sur les demandes de changement de prénoms ou de noms ;
  • sur la modification de la mention du sexe dans les actes d’état civil ;
  • sur les demandes liées à la déclaration d’absence d’une personne ;
  • sur les décisions du juge aux affaires familiales qui vont venir mettre fin à une instance comme en matière de divorce ou de séparation de corps ;
  • sur les demandes relatives à la filiation et subsides ;
  • sur les demandes liées à l’adoption.

 

En outre, notez que devant le conseil des Prudhommes, l’exécution provisoire n’est pas de droit (sauf si la loi ou le règlement en dispose autrement). Enfin devant le tribunal de commerce et le tribunal judiciaire, la décision qui déclare une faillite personnelle ou une interdiction de diriger, est assortie d’une exécution provisoire facultative.

Toutefois, le juge peut la prononcer d’office ou à la suite d’une demande de l’une des parties, à condition qu’il estime que l’exécution provisoire est nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire.

 

La suspension de l’exécution provisoire

 

Malgré ce principe, il existe des hypothèses dans lesquelles il est possible pour le juge de suspendre l’exécution provisoire de droit. En effet, dans le cadre d’un appel, vous pouvez saisir le premier Président de la Cour d’appel afin de lui demander de suspendre l’exécution provisoire de la décision. 

Cette possibilité est inscrite à l’article 514-3 du Code de procédure civile. Toutefois, pour neutraliser l’exécution provisoire de droit, deux conditions cumulatives doivent être réunies. Premièrement, il faut qu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision rendue en première instance et deuxièmement, il faut prouver qu’il existe un risque que l’exécution entraîne des conséquences manifestement excessives.

Concernant la première condition, il est donc nécessaire pour le demandeur de justifier de l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision. En réalité, il revient au Premier président d’apprécier si la décision de première instance ne comporte pas une erreur de droit qui pourrait justifier de sa réformation.

Concernant la seconde condition, celle-ci revient à savoir ce qu’on doit comprendre par « conséquences manifestement excessives ». Il faut regarder la jurisprudence et la Cour de cassation a considère notamment que : 

« le caractère manifestement excessif des conséquences de l’exécution provisoire devait s’apprécier, quel que soit le montant de la condamnation, exclusivement, au regard de la situation du débiteur, compte tenu de ses facultés, ou des facultés de remboursement du créancier »

Cette condition sera appréciée au cas par cas. Il n’existe pas de liste exhaustive d’hypothèses dont les conséquences manifestement excessives ont pu être caractérisées. Par exemple, il faut se demander si (et le cas échéant prouver que) l’application de l’exécution provisoire entraînerait des conséquences irréversibles pour le débiteur.

 

L’importance de se faire accompagner par un avocat spécialisé

 

L’exécution provisoire est donc une procédure complexe contenant de nombreuses exceptions qu’il faut maîtriser afin d’éviter les mauvaises surprises.

Ainsi, il est indispensable de se faire accompagner par un avocat spécialisé qui sera le professionnel le plus à même de défendre vos intérêts et de vous éclairer sur le déroulé de la procédure dans le cadre d’un procès.

 

 

Avocat au Barreau de Paris, spécialisé en droit des affaires et droit commercial, Me Matthieu Chauveau accompagne notamment les entreprises dans leurs aspects contentieux (rupture de relations commerciales, rupture de pourparlers, responsabilité des dirigeants, etc.).  Il a également développé une expertise dans les contentieux bancaires liés aux problématiques de TEG et de SWAP. Enfin, il assiste les entreprises dans leur création et les conseille dans les problématiques juridiques qu'elles peuvent rencontrer quotidiennement.

Relu par Clémence Bonnet. Diplômée de l'École des Avocats
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