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Loi El Khomri : où en est-on ? quel impact pour les employeurs ?

Maxime Wagner
Écrit par Maxime Wagner. Co-fondateur de Captain Contrat. Diplômé de Centrale Lille et l'ESSEC.

Manifestations, mouvement Nuit Debout, grève des transports, stations-service fermées, motion de censure rejetée, application de l’article 49-3 pour faire voter la loi malgré le refus des parlementaires… Mais que se passe-t-il réellement en France et quelle est l’étendue réelle de cette Loi El K2omri qui concerne tous les aspects de la vie en entreprise ? Où en est-elle actuellement dans le processus de vote ? Quelles seraient les conséquences pour les entrepreneurs en cas d’application définitive ?

 

 

Quels sont les principaux dispositifs prévus par le projet de loi ?

 

Durée du travail : quid de la suppression des 35h ?

 

Contrairement aux idées reçues, le Code du travail prévoit déjà expressément à l’article L3125-35 qu’ « au cours d’une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser quarante-huit heures ». Mais le code prévoit également l’autorisation pour certaines entreprises de dépasser « en cas de circonstances exceptionnelles » et « pendant une période limitée le plafond de quarante-huit heures, sans toutefois que ce dépassement puisse avoir pour effet de porter la durée du travail à plus de soixante heures par semaine ».

Le projet de loi El Khomri dans sa version initiale prévoyait d’allonger la période sur laquelle la durée maximale de temps de travail hebdomadaire est calculée (quarante-quatre heures en moyenne au maximum par semaine, sur seize semaines et non plus douze). Mais dans sa nouvelle version la période de douze semaines est maintenue, avec une possibilité de passer à quarante-six heures, toujours sur douze semaines (cette possibilité étant également prévue dans le Code de travail dans sa version actuelle à l’article L3125-36).

 

Et les heures supplémentaires ?

 

Actuellement, la majoration des heures supplémentaires est de 25% pour les huit premières heures, et de 50% pour les suivantes. Il y a également un plancher de 10% en cas d’accord d’entreprise ou d’accord de branche. Les heures supplémentaires étant décomptées chaque semaine, sur une durée d’un an maximum.

Le projet de loi El Khomri prévoit que désormais, l’accord de branche ne s’appliquerait qu’à défaut d’accord d’entreprise. Le risque étant selon les opposants au projet de loi, que l’employeur ne soit pas lié par l’accord de branche (qu’ils estiment plus avantageux pour les salariés) et puisse appliquer une majoration la plus basse qui soit (de 10%). De plus, le décompte des heures supplémentaires pourrait durer jusque 3 ans, ce qui retarderait leur paiement.

 

Le référendum d’entreprise

 

Pour valider un accord d’entreprise, la loi prévoit que les syndicats doivent désormais représenter au moins 50% des suffrages et non plus 30% tel qu’il est de rigueur aujourd’hui.

Si le syndicat majoritaire d’une entreprise refuse de signer un accord sur le temps de travail, la Loi El Khomri offre la possibilité aux syndicats minoritaires (représentant entre 30 et 50% des salariés), de consulter les salariés par référendum, et seulement, pour le moment, sur les sujets concernant la modification de la durée de travail. Ces derniers auront donc le dernier mot sur la validation ou non dudit accord.

Lors de la lecture du projet par l’Assemblée Nationale, cette dernière avait ajouté le délai d’un mois pour solliciter ce référendum, et une mise en place dans les deux mois suivants.

 

Nouvelle définition du licenciement économique 

 

C’est probablement un des sujets les plus sensibles et la cause principale de tous les débats nationaux. La loi El Khomri modifie les conditions de validité d’un licenciement économique. Voici les nouveaux critères prévus par la loi pour que les entreprises puissent l’appliquer :

  • Une « baisse des commandes ou du chiffre d’affaires» pendant plus d’1 trimestre pour les PME de – de 11 salariés ;
  • 2 trimestres consécutifs pour les entreprises de 11 à 50 salariés ;
  • Et 3 trimestres consécutifs pour les entreprises de 50 à 300 salariés.

 

Par ailleurs, d’autres difficultés économiques seront susceptibles de justifier un licenciement économique: « des pertes d’exploitation pendant plusieurs mois » (représentant aujourd’hui un semestre, mais pouvant être amené à un trimestre par un accord collectif), « une importante dégradation de la trésorerie », ou par « tout élément de nature à justifier ces difficultés ».

Les motifs de licenciement actuellement inscrits dans le Code du travail resteront applicables. Il s’agit des « mutations technologiques », « de la réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité », ou bien la « cessation d’activité ».

Une précision est cependant ajoutée dans le projet de loi : « les difficultés économiques créées artificiellement pour procéder à des suppressions d’emploi » seront rejetées et ne pourront constituer un motif de licenciement valable.

Ces difficultés seront prises en compte « au niveau de l’entreprise si cette dernière n’appartient pas à un groupe ». Le cas échéant, « au niveau du secteur d’activité commun aux entreprises implantées sur le territoire national du groupe auquel elle [l’entreprise] appartient ».

 

Le forfait annuel en jours

 

Le projet de loi prévoit que le forfait s’appliquerait sur accord d’entreprise ou à défaut, sur accord de branche (tel que prévu aujourd’hui), à des cadres ou des salariés « dont la durée de temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps. ». La durée annuelle de travail ne peut excéder 218 jours (235 jours à défaut d’accord fixant le nombre de jours maximal).

La question des 35 heures hebdomadaires ne s’appliquent donc pas à eux. L’employeur doit cependant s’assurer que « la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ». Un entretien annuel avec le salarié devra se tenir afin de déterminer si cette charge de travail s’articule correctement avec sa vie privée (afin d’être en conformité avec la Charte sociale européenne du 18 octobre 1961 qui pose le principe d’un droit à des conditions de travail équitables, et notamment une durée de travail raisonnable).

 

Suppression du plafonnement des indemnités prud’homales

 

À l’origine et dans sa version actuelle, le Code du travail ne prévoit pas d’indemnités en cas de « licenciement abusif » accordées par les prud’hommes, mais seulement un minimum de six mois de salaire, en plus de l’indemnité de licenciement.

Le projet de loi El Khomri avait proposé la mise en place d’un barème fixe, avec l’allocation d’une indemnité minimum en fonction de l’ancienneté du salarié. Dans la version réécrite du projet de loi ces plafonds ont été supprimés et il appartient au juge de décider du montant de l’indemnité en cas de licenciement abusif, selon un barème indicatif qu’il décidera ou non d’exécuter.

 

Mais quelle est la réelle différence entre des accords de branche et des accords d’entreprise ?

 

L’accord de branche est un contrat conclu entre les représentants des salariés et les employeurs, - sur des sujets tels que les conditions d’emploi ou les garanties des salariés,-  et applicable pareillement à toutes les entreprises d’un même secteur d’activité. L’accord d’entreprise est le résultat de négociations qui ne sont mises en œuvres qu’au sein de l’entreprise, et il ne peut déroger à l’accord de branche que s’il s’est plus favorable aux salariés.

Selon le projet de loi El Khomri, l’accord de branche ne s’appliquerait qu’à défaut d’accord d’entreprise. Les opposants au projet de loi y voient comme un moyen pour les employeurs de négocier des accords spécifiques au sein de leur entreprise, bien plus défavorables aux salariés, et sans parvenir à éviter des dérives qu’un accord de branche global arrivait jusqu’ici à maîtriser.

Juridiquement parlant, et selon la hiérarchie des normes établie en France, la loi continuera de primer sur les accords de branche et d’entreprise. Cela signifie que l’accord d’entreprise négocié ne pourra jamais aller au-delà du cadre légal. En outre, l’objectif même de l’accord est de trouver un « accord » par le biais de négociations, ce qui laisse la parole aux salariés qui auront encore leur mot à dire. Il ne faut également pas oublier le référendum d’entreprise qui permet aux syndicats de consulter directement les salariés pour qu’ils puissent prendre position sur la volonté ou non de signer l’accord.

En somme, seules la mise en œuvre de la loi ainsi que les jurisprudences nous permettront de conclure sur son application pratique en termes juridiques et d’en affiner les contours.

 

Où en est le processus d’adoption de la loi El Khomri aujourd’hui ?

 

Quel est l’impact de l’article 49-3 de la Constitution ?

 

L’article 49-3 de la Constitution permet au Premier Ministre, après délibération du Conseil des Ministres, d’adopter un projet de loi sans passer par le vote du texte par l’Assemblée Nationale, sauf si cette dernière dépose une motion de censure, dans les 24h. Celle-ci pour être recevable, doit être présentée par au moins 1/10ème des députés, puis votée à la majorité absolue des parlementaires.

La motion de censure déposée en mai dernier, concernant le projet de loi El Khomri était un moyen pour les parlementaires de montrer leur désapprobation face à la politique du gouvernement (et a fortiori sur le projet de loi) et le forcer à démissionner.

Cependant, cette motion de censure ayant été rejetée, le projet de loi du Gouvernement a pu passer en force auprès de l’Assemblée Nationale. Mais cela ne signifie pas qu’il est définitivement voté et applicable au sein de nos entreprises. En effet, il reste encore plusieurs étapes à franchir avant son application.

 

Le processus d’adoption d’une loi en France

 

Le processus legislatif en France

Où en est le projet de loi El Khomri aujourd’hui ?

 

Après un passage en force à l’Assemblée Nationale, le projet de loi vient d’être examiné par la Commission des Affaires Sociales du Sénat, avec de multiples modifications apportées, notamment au sujet des 35h. Les sénateurs souhaiteraient supprimer la durée légale de travail pour la remplacer par une durée de référence qui serait fixée par accord d’entreprise, ou à défaut, par accord de branche. En cas d’absence d’accord, la durée légale minimale serait de 39h.

Mais rien n’est établi pour le moment puisqu’en cas de désaccord significatif sur le projet de loi entre l’Assemblée Nationale et le Sénat, le texte sera débattu et voté en Commission mixte paritaire[1]. C’est seulement si un accord est trouvé que la loi sera votée. Mais un contrôle de constitutionnalité restera possible pour vérifier la conformité de la loi à la Constitution. Si la loi s’avère conforme, le Président la signera, elle sera alors promulguée et entrera en vigueur par le biais d’un décret d’application mis en place au niveau national.

[1] Prévue à l’article 45 de la Constitution, cette Commission est composée de sept députés et sept sénateurs, et d’autant de membres suppléant. Le but de cette réunion étant de trouver un accord sur le projet ou la proposition de loi qui leur est soumis.

 

 

Maxime Wagner
Écrit par Maxime Wagner
Maxime Wagner est diplômé de Centrale Lille et d'un MBA à l'ESSEC. Il démarre sa carrière dans la distribution, où il s'intéresse aux méthodes de management et d'organisation ainsi qu'aux problématiques d'innovation. Fin 2012, il quitte Carrefour et lance, avec Philippe, Captain Contrat. Son objectif : lancer une start-up à impact positif sur la société et dans laquelle chacun est heureux de travailler.
Relu par Pierre-Florian Dumez. Diplômé en droit

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