L’un des principes fondamentaux en droit des contrats, outre la liberté contractuelle, réside dans la force obligatoire du contrat.
Qu’est-ce que la force obligatoire du contrat ? Qu’est-ce qu’elle implique pour les parties ? Quelles sont ses conséquences ?
Me Anthony Canivez décrypte pour vous le sujet de la force obligatoire du contrat, ses effets et ses limites.
- Notion : qu’est-ce que la force obligatoire du contrat ?
- Quelles sont les exceptions et les dérogations à la force obligatoire du contrat ?
- Qu’en est-il des obligations contractuelles, voulues et imposées ?
- Qu’en est-il de la révocation du contrat ?
- Les éléments à retenir s’agissant de la force obligatoire du contrat
Notion : qu’est-ce que la force obligatoire du contrat ?
La force obligatoire est l’un des principes fondateurs du droit des contrats. Il tient sa source dans l’article 1103 du Code civil qui dispose que “les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites”. Que faut-il comprendre de cette formule ? Les contrats régulièrement conclus entre les parties par l’échange de leur consentement réciproque s’imposent aux parties autant que des lois.
Ce dernier point est un aspect fondamental, qui permet l’accomplissement du principe de la force obligatoire du contrat. En effet, celle-ci ne naît qu’après que les parties ont pu négocier les stipulations contractuelles et échanger leur consentement mutuel. Cette condition de consentement et d’absence de vice est indispensable à la naissance de la force obligatoire du contrat.
Dès lors, la conclusion du contrat emporte sa force obligatoire ce qui implique que les parties sont tenues à l’exécution des obligations qui découlent de ce contrat sous peine de sanction (dommages et intérêts, réduction du prix, résolution du contrat…). De la même manière, la force obligatoire du contrat implique que la modification de celui-ci n’est rendue possible que par un nouvel échange de consentement par les parties ou par les cas spécifiquement déterminés par la loi.
Quelles sont les exceptions et les dérogations à la force obligatoire du contrat ?
La force obligatoire du contrat se limite d’abord en lui-même. C’est-à-dire que la force obligatoire qui émane de la volonté des parties formulée par la signature du contrat, peut se renouveler lorsque les parties, par un nouvel échange de volonté, décident de modifier le contrat qu’elles ont conclu. Dans ce cas de figure, on considère que la modification du contrat doit se faire selon les mêmes formalités que pour sa conclusion initiale. Ainsi, si le contrat a été rédigé par écrit et signé par les parties, sa modification devra se faire dans les mêmes conditions afin d’assurer une certaine sécurité juridique.
Par ailleurs, le fait qu’une force obligatoire soit affectée au contrat ne signifie pas nécessairement que toutes les conditions qui y ont été inscrites sont intangibles. Les parties peuvent choisir d’intégrer dans leur contrat certaines clauses qui rendront possible sa modification ultérieure.
Par exemple, la clause d’indexation permet de faire varier le prix prévu au contrat en fonction d’un indice de référence objectif qui doit avoir été désigné au sein du contrat (cela existe notamment pour le prix des baux commerciaux). Par ailleurs, les parties peuvent intégrer une clause de renégociation à certaines étapes de la vie de leur contrat afin de redéfinir les conditions de leurs relations commerciales.
Le législateur est d’ailleurs intervenu en faveur de cette possibilité de renégociation lorsque les conditions fixées par le contrat sont devenues irréalisables par l’une des parties en raison de circonstances imprévisibles. Le but n’est pas de faire obstacle au principe de la force obligatoire des contrats mais de permettre une renégociation dans certaines circonstances exceptionnelles : il s’agit de la théorie de l’imprévision. L’article 1195 du Code civil prévoit que : “Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.”
Cela se manifeste par exemple dans les contrats-cadre. Ainsi, si une crise sans précédent qui n’était pas légitimement prévisible par les parties en leur qualité de professionnel a engendré une augmentation exponentielle du prix d’un matériau ou d’une matière première rendant le coût de production du produit bien supérieur à son prix de vente fixé au sein du contrat, il est possible de considérer que la renégociation du contrat issue d’un phénomène imprévisible trouverait à s’appliquer.
Dans ce cas de figure, si les parties ne parvenaient pas à parvenir à un accord à l’issue de la renégociation du contrat, elles pourraient convenir de la résolution du contrat c’est-à-dire de son annulation, soit dans les conditions qu’elles auraient elles-mêmes fixées, soit en ayant recours au juge.
Qu’en est-il des obligations contractuelles, voulues et imposées ?
Les obligations contractuelles sont celles qui découlent du contrat et qui doivent être exécutées par les parties. Certaines obligations sont explicites et découlent clairement du contrat de sorte qu’il n’existe aucune incertitude à leur sujet. Parfois, les stipulations contractuelles peuvent être plus obscures et semer le doute. Dans une telle situation, le juge saisi d’un litige à ce sujet devra rechercher l’intention commune des parties en évaluant ce qui ressort du contrat pris dans son ensemble. De la même manière, si plusieurs contrats sont interdépendants les uns des autres en ce qu’ils concourent à la réalisation d’une même opération, ils devront être interprétés conjointement.
On peut rencontrer ce type de situation dans le cas des contrats interdépendants. Par exemple, si un contrat de fourniture de matériels informatique a été conclu simultanément à un contrat de maintenance de ce même matériel de manière interdépendante, cela aura pour conséquence que la rupture de l’un entraînera la caducité et donc la rupture de l’autre. Ce type de situation ne pourra toutefois se faire que dans le respect des obligations des parties et en l’absence de faute dans la résiliation du premier contrat.
Par ailleurs, les obligations contractuelles des parties peuvent être complétées par des obligations imposées par la loi. Ainsi, l’article 1194 du Code civil dispose que “Les contrats obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur donnent l'équité, l'usage ou la loi”. Il découle de cette disposition législative deux obligations fondamentales que sont l’obligation de sécurité et l’obligation d’information et de conseil qui s’appliquent à certains professionnels (banquier, médecin, avocat).
Qu’en est-il de la révocation du contrat ?
De la même manière que pour la formation du contrat, la révocation de celui-ci peut intervenir si elle résulte de la volonté commune des parties. Ainsi, les parties qui concluent ensemble un contrat par leur consentement mutuel, peuvent décider dans les mêmes conditions de le modifier et même de le révoquer.
Ainsi, la rupture du contrat peut tout à fait résulter de la commune intention des parties.
Les éléments à retenir s’agissant de la force obligatoire du contrat
Les éléments à retenir s’agissant de la force obligatoire du contrat :
- La force obligatoire est l’un des principes fondateurs du droit des contrats (article 1103 du Code civil) : les contrats régulièrement conclus entre les parties par l’échange de leur consentement réciproque s’imposent aux parties autant que des lois.
- Dès lors, la conclusion du contrat emporte sa force obligatoire ce qui implique que les parties sont tenues à l’exécution des obligations qui découlent de ce contrat sous peine de sanction (dommages et intérêts, réduction du prix, résolution du contrat…).
- La modification et la révocation du contrat peuvent intervenir dans les mêmes conditions que pour sa formation : par un échange de consentement entre les parties.
- Les parties peuvent toutefois intégrer des clauses d’indexation ou de renégociation au sein de leur contrat.
- La loi prévoit également qu’en cas de circonstances exceptionnelles et imprévisibles rendant la réalisation des obligations, telles que formulées dans le contrat, impossibles, les parties doivent entrer en négociation afin de trouver des conditions plus pérennes pour l’exécution de leurs obligations ou pour mettre un terme au contrat.
- Certaines obligations supplémentaires découlent du contrat : les contrats interdépendants, ou les obligations découlant de l’usage, de l’équité ou de la loi.
- Faites-vous accompagner par un avocat qui saura vous accompagner dans la conclusion de vos contrats, leur renégociation ou leur résiliation !
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