Vous souhaitez acheter ou vendre votre officine de pharmacie ? Avant de vous lancer, sachez qu’il ne s’agit pas d’une opération de cession de fonds de commerce comme les autres. En effet, la spécificité de la législation pharmaceutique implique de suivre une procédure bien plus complexe. Quelles sont les particularités de la cession d’une pharmacie ? Comment une telle opération se déroule-t-elle ?
- Officine de pharmacie : un fonds de commerce comme les autres ?
- Les conditions liées aux parties
- Achat des murs ou droit au bail : faites le bon choix !
- Le choix de l’emplacement de l’officine de pharmacie
- La détermination du prix de cession
- Les points à anticiper avant la signature de l’acte de cession
- Et après la signature de l’acte cession ?
- L’importance de faire appel à un professionnel
Officine de pharmacie : un fonds de commerce comme les autres ?
Avant toute chose, vous devez avoir en tête qu’une officine de pharmacie n’est ni plus ni moins qu’un fonds de commerce.
Pour rappel, le fonds de commerce désigne l’ensemble des éléments corporels et incorporels nécessaires à l’exercice de l’activité de l’entrepreneur : mobilier, matériel, véhicules, enseigne, clientèle, droit au bail,...
L’officine de pharmacie est un établissement ayant pour activité la préparation et la vente au détail de médicaments. Elle comprend une clientèle, un droit au bail et des éléments corporels tels que le mobilier et le matériel. Il en résulte que sa cession obéit aux règles de la cession de fonds de commerce classique.
Ceci étant, en raison des particularités de la législation applicable à l’activité pharmaceutique, la cession de l’officine de pharmacie est soumise à des règles spécifiques et plus strictes.
Les conditions liées aux parties
Le cédant
Pour pouvoir vendre son officine de pharmacie, le cédant doit être titulaire du diplôme d’Etat de docteur en pharmacie et posséder la qualité de pharmacien.
De plus, il doit être propriétaire de l’officine de pharmacie qu’il souhaite céder. Sachez cependant que plusieurs pharmaciens peuvent être copropriétaires de l’officine.
Le pharmacien peut exploiter son officine de pharmacie en nom propre ou sous la forme d’une société unipersonnelle (EIRL, EURL, SEL unipersonnelle,...). Il peut aussi s’associer à d’autres pharmaciens sous la forme d’une société pluripersonnelle (SNC, SARL, SEL pluripersonnelle,...). La pharmacie peut également être en statut SELARL.
Un pharmacien ne peut être propriétaire que d’une seule pharmacie et il doit exercer personnellement sa profession.
L’acquéreur
Avant tout, celui qui souhaite racheter une officine de pharmacie doit être titulaire du diplôme de pharmacien et enregistré auprès de l’Ordre des pharmaciens. Il doit également justifier d’une expérience professionnelle d’au moins 6 mois, dans l’hypothèse où il n’aurait pas effectué le stage de fin d’études. La reprise est un bon moyen pour ouvrir une pharmacie lorsque l'on débute.
Par ailleurs, l’acquéreur doit être de nationalité française, remplir des conditions de moralité et ne pas présenter un état pathologique ou d’infirmité rendant impossible ou dangereux l’exercice de sa profession.
Le Code de la santé publique impose à l’acquéreur d’effectuer une déclaration préalable de début d’exploitation auprès du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens dans le ressort territorial duquel est située l’officine. C’est un point sur lequel j’attire particulièrement l’attention de mes clients. Cette formalité est essentielle ! Il est nécessaire d’accompagner sa demande d’un dossier comprenant notamment son identité, sa qualification, les conditions d’exercice, les statuts de la personne morale exploitante le cas échéant, le lieu d’implantation de l’officine, etc. Le conseil de l’Ordre des pharmaciens est ensuite chargé de transmettre le dossier à l’Agence régionale de santé (ARS). La déclaration préalable de début d’exploitation a ensuite vocation à être enregistrée. Notez que la réalisation de la cession se fait sous la condition suspensive d’enregistrement de la déclaration.
Par ailleurs, si l’acquéreur n’est pas tenu de solliciter une licence d’exploitation auprès de l’ARS, il doit en revanche demander son inscription au tableau de l’Ordre des pharmaciens.
Enfin, le pharmacien qui acquiert l’officine de pharmacie a le statut de commerçant. Il est ainsi soumis aux obligations classiques du Code de commerce applicables à tout commerçant. Par exemple, il est tenu de procéder à l’immatriculation de l’officine au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS). Il doit également tenir des registres et des livres de commerce et établir un bilan et un inventaire annuels.
Achat des murs ou droit au bail : faites le bon choix !
L’acquéreur peut choisir de racheter le droit au bail dans le cadre de la cession d’officine de pharmacie. Cela va permettre à l’acquéreur de reprendre le bail commercial conclu entre le cédant et le propriétaire. Parce que ce contrat est particulièrement complexe et source de conflits, je recommande toujours à mes clients d’analyser scrupuleusement l’ensemble des clauses qu’il contient : montant du loyer, cession du bail, charges du bailleur et du locataire, travaux et réparation, durée du contrat,... La situation locative doit être extrêmement claire.
Si l’occasion se présente à lui, l’acquéreur peut toutefois préférer devenir propriétaire des murs au sein desquels se trouve l’officine de pharmacie. Dans ce cas, il doit procéder à certaines vérifications comme l’état de l’immeuble, l’existence de charges de copropriété ou non, etc. Aussi, il peut être intéressant pour l’acquéreur de réfléchir au montage juridique le plus avantageux pour lui d’un point de vue fiscal. En effet, il peut intégrer les murs dans son actif professionnel ou bien les conserver dans son patrimoine privé, le plus souvent au travers de la création d’une Société Civile Immobilière (SCI).
Il est fortement recommandé de faire appel à un professionnel qui vous indiquera les avantages et les contraintes de chaque option.
Le choix de l’emplacement de l’officine de pharmacie
Comme indiqué précédemment, l’acquéreur décide de racheter un fonds de commerce déjà existant. Il peut devenir soit locataire en lieux et places du cédant, dans le cadre de la reprise du bail commercial, soit propriétaire des murs. Il n’a donc pas à choisir l’emplacement de l’officine de pharmacie qu’il rachète.
Mais comme tout rachat de fonds de commerce, le choix de l’emplacement est à prendre en compte. Dans le cadre d’un rachat, les possibilités seront sans doute moindres que dans le cas d’une création, toutefois, la réflexion ne doit pas être éludée. En effet, votre choix différera sans doute entre un local peu accessible, éloigné des commerces et un local implanté dans le centre d’une ville ou proche d’une sortie de métro par exemple.
Dans le cadre de la création d’une officine de pharmacie, d’autres questions devront être posées.
Dans cette hypothèse, sachez que la réglementation liée à l’implantation est extrêmement stricte. Vous ne pouvez pas vous installer où vous voulez. L’ARS doit vous donner une autorisation spéciale, après avis de l’Ordre des pharmaciens. Des seuils démographiques minimums sont requis et il faut satisfaire à certains critères tels que la présence d’une population résidente à desservir, l’accessibilité et la conformité du local, l’organisation du local, etc.
La détermination du prix de cession
L’officine de pharmacie peut faire l’objet d’une cession à titre gratuit ou à titre onéreux. Dans ce dernier cas, comment déterminer le prix de cession ? Quelles méthodes faut-il appliquer pour valoriser l’officine de pharmacie ?
Il existe plusieurs méthodes purement comptables auxquelles vous pouvez recourir pour estimer le prix de cession de l’officine de pharmacie.
Vous pouvez d’abord appliquer la méthode dite des barèmes. Concrètement, vous tenez compte d’un multiple du chiffre d’affaires annuel réalisé par l’officine de pharmacie pour déterminer le prix de cession. Sachez qu’en 2020, le barème moyen est de 90% du chiffre d’affaires annuel HT.
Vous pouvez également vous fonder sur l’EBE (résultat d’exploitation). Cette méthode est plus complexe que la précédente, mais de loin privilégiée par les banques car elle permet d’analyser la rentabilité de l’affaire et la capacité de remboursement de la société.
Concrètement, il vous faudra alors analyser le résultat d’exploitation de l’officine. Cela peut vous paraître difficile si vous avez peu de connaissances et compétences en finance et comptabilité. Il est conseillé de s’entourer des conseils d’un expert financier ou d’un avocat spécialisé.
Enfin, vous pouvez tout simplement procéder par comparaison. En clair, vous analysez l'officine de pharmacie que vous souhaitez acheter/vendre par rapport à d’autres officines qui ont fait l’objet d’une cession dans une période rapprochée. Sachez cependant que chaque officine est différente ! Il y a donc une marge d’erreur plus ou moins grande à prendre en compte.
Ceci dit, une analyse purement financière ne suffit pas pour déterminer le prix de cession d’un fonds de commerce. Il est essentiel de prendre en compte des données très factuelles : localisation de l’officine, caractéristiques et organisation du local, travaux d’aménagement si besoin, nombre de salariés, charges réparties entre le bailleur et le locataire, durée du contrat de bail, valeur locative du marché, etc. Le type de la patientèle ainsi que savoir si la cession de la clientèle est partielle ou totale rentrent également en compte dans le prix.
Vous ne savez pas quelle méthode utiliser pour valoriser l’officine de pharmacie ? Seul un expert dans ce domaine peut vous conseiller et vous orienter vers la meilleure solution.
Les points à anticiper avant la signature de l’acte de cession
Généralement, les parties formalisent leur accord à travers deux actes successifs que sont la promesse de cession et l’acte définitif de cession.
Certains points sont d’ores et déjà fixés comme la reprise des contrats de travail et d’assurance. Ceux-ci sont automatiquement cédés avec le fonds de commerce. Il n’y a pas d’obligation de reprise des autres contrats en cours.
D’autres points restent à négocier. C’est le cas par exemple de la cession du stock et des marchandises. Si ces éléments sont la plupart du temps repris par l’acquéreur, ils ne font pas partie des éléments constitutifs du fonds de commerce. Il faut donc que les parties insèrent dans l’acte de cession une clause spécifique sur la cession du stock et des marchandises et se mettent d’accord sur l’évaluation du stock, le prix des marchandises, etc.
Par ailleurs, la promesse de cession contient très souvent les principales conditions suspensives, c’est-à-dire les conditions qui doivent être absolument réalisées pour permettre la cession effective de l’officine de pharmacie.
Dans toute cession de fonds de commerce, on retrouve très souvent l’octroi d’un crédit bancaire et l’information préalable des salariés.
Mais dans le cadre de la cession d’officine de pharmacie, il existe une condition suspensive bien particulière : l’acquéreur doit demander son inscription au tableau de l’Ordre des pharmaciens, faire enregistrer son diplôme et sa déclaration d’exploitation. D’ailleurs, l’entrée en jouissance est généralement fixée à compter de la date d’enregistrement de la déclaration d’exploitation.
Et après la signature de l’acte cession ?
Après la signature de l’acte de cession, vous vous en doutez, il reste à accomplir, aussi bien pour le cédant que pour l’acquéreur, un certain nombre de démarches.
L’acquéreur est tenu, dans le mois suivant la signature de l’acte de cession, d’enregistrer la cession de l’officine de pharmacie et de payer les droits d’enregistrement. Il doit également accomplir toutes les formalités de publicité : publier un avis dans un Journal d’Annonces Légales (JAL) et au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).
De son côté, le cédant est tenu de clôturer ses comptes et d’effectuer les déclarations fiscales nécessaires. S’il compte ne plus exercer en tant que pharmacien, il devra également demander sa radiation du RCS auprès du Centre de Formalités des Entreprises (CFE).
L’importance de faire appel à un professionnel
Vous l’aurez compris, la cession d'une officine de pharmacie est une opération complexe aussi bien pour l’acquéreur que pour le cédant. Cela s’explique par le fait que la cession de fonds de commerce obéit depuis toujours à des règles très strictes. Aussi et surtout, le secteur pharmaceutique étant très réglementé, les modalités de l’opération sont spécifiques.
Dans ce contexte, vous avez tout intérêt à faire appel à un avocat spécialisé.
Il vous accompagnera tout au long de l’opération de cession et vous assistera à chaque étape. Il vous aidera à accomplir les formalités requises et à négocier les clauses qui vous sont les plus avantageuses. Il vous conseillera sur la méthode de fixation du prix et d’évaluation du stock. Il vous aidera à choisir entre l’acquisition des murs et le bail commercial. Enfin il vous assistera dans la rédaction de votre promesse de vente et d’acte de vente.
Comme dans certains cas pour créer son entreprise, faire appel à avocat spécialisé est le gage d’une cession d’officine de pharmacie réussie !