Lorsque des salariés quittent une entreprise, celle-ci est parfois confrontée à des actes de concurrence déloyale qui peuvent s’avérer catastrophiques pour son activité. Il est en effet fréquent qu’un cadre indélicat, attiré par de nouvelles perspectives, fasse profiter son nouvel employeur de son carnet d’adresse, sans se soucier des conséquences néfastes pour son ancienne société.
Si la liberté du commerce est essentielle, celle-ci n’est pas absolue et ne peut permettre des comportements inacceptables, causant un préjudice certain à des acteurs économiques.
La déloyauté des agissements d’un ancien salarié s’apprécie généralement de façon concrète, par la découverte que celui-ci utilise son ancien fichier clients, le savoir-faire acquis grâce son ancien employeur ou incite ses anciens collègues à le rejoindre afin de développer une activité à moindre frais.
La conséquence principale est naturellement la chute soudaine du chiffre d’affaires de la société victime de ces actes.
Alertée par cette situation, cette dernière est souvent désireuse de faire sanctionner cette concurrence déloyale devant les tribunaux.
Concurrence déloyale : comment obtenir réparation ?
À cet effet, il lui est nécessaire de justifier d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité.
Le préjudice est généralement aisé à démontrer, une comparaison entre les marges brutes réalisées antérieurement et postérieurement au départ du salarié fautif suffit à l’établir.
La preuve d'une faute
La principale difficulté réside toutefois dans la démonstration des fautes : la société victime est souvent informée par ses clients que ceux-ci ont été démarchés par l’ancien salarié, des rumeurs peuvent se propager au sein du personnel ou le fautif peut commettre une erreur un adressant un email à un mauvais destinataire.
Mais dans la majorité des cas, les clients se refusent à établir des attestations écrites, préférant ne pas s’immiscer dans une procédure judiciaire qui leur est étrangère.
La société victime se trouve donc démunie : sa perte financière est certaine et peut être calculée mais elle ne peut l’attribuer, par des éléments écrits incontestables, à son ancien employé.
Dans un tel cas de figure, une action judiciaire doit être déconseillée. La jurisprudence en la matière est bien établie et exige des preuves écrites afin d’imputer les pertes à la personne poursuivie.
L'option de la perquisition privée
La seule solution à ce cas de figure que connaissent de trop nombreuses entreprises consiste à tenter d’obtenir d’un tribunal l’autorisation de saisir des documents sur l’ordinateur et/ou le téléphone portable de l’ancien salarié.
Une telle action est permise par l’article 145 du Code de procédure civile, lequel permet « de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige ».
Il convient ainsi de rédiger une requête établissant les indices liés à l’existence d’actes de concurrence déloyale (perte du chiffre d’affaires, commencement de preuves relatifs aux actes fautifs etc.).
Concurrence déloyale : la procédure de perquisition privée ?
Cette requête devra être soutenue devant le président du tribunal compétent afin d’exposer ses arguments et de le convaincre du bien fondé de l’action. Naturellement, l’adversaire n’en sera pas informé, l’un des principaux traits de cette action étant son caractère secret.
Un certain nombre de magistrats étant désormais assez prudents dans le cadre de la délivrance d’ordonnances de ce type, une rédaction précise, argumentée et étayée est fondamentale au succès de l’action.
L’objectif est d’obtenir une ordonnance permettant à un justiciable d’envoyer un huissier et un expert informatique, souvent accompagnés des forces de l’ordre, au siège de son concurrent afin de faire saisir le maximum de documents (mails, documents comptables, fichier clients, factures, devis, dossiers papier etc.).
L’effet de surprise est naturellement garanti, la société « perquisitionnée » découvrant bien souvent l’existence de cette procédure à ses dépens. Si l’ordonnance a été rédigée de façon précise et que l’ancien salarié a effectivement commis des actes de concurrence déloyale, les pièces saisies ne laisseront que peu de doutes sur l’issue du procès à venir.
La société victime d'un acte de concurrence déloyale sera quasi certaine de faire condamner sa concurrente à des dommages intérêts à hauteur de la perte subie.
Si l’efficacité de cette procédure peut être redoutable, c’est à la condition qu’aucune erreur ne soit commise, tant sur le fond que sur la forme. La rédaction de ce document par un expert de la procédure est donc fortement recommandée. L’adversaire aura en effet le droit de solliciter la rétractation de l’ordonnance ayant autorisé la saisie et tentera, afin de l’obtenir, de déceler toutes les failles potentielles.