Après des mois de débats, 12 journées de grèves et de manifestations et 3 recours à l’article 49-3, la loi El Khomri a finalement été adoptée définitivement par l’Assemblée Nationale le 21 juin dernier.
Le Conseil Constitutionnel, saisi dans le cadre d’un contrôle à priori le 4 août dernier n’a censuré que 5 articles secondaires de la loi. La Haute juridiction ne s’est en revanche pas prononcée sur les dispositions les plus controversées comme celles sur le licenciement économique ou les accords offensifs.
Celles-ci ne sont cependant pas à l’abri d’une censure dans le cadre d’un contrôle à postériori de la loi, dit « QPC ».
Publiée au journal officiel le 9 août 2016, la loi devrait entrer en application dans les mois à venir.
Voici ce qu’elle va changer !
- Les nouveaux critères du licenciement économique
- La primauté de la négociation d’entreprise
- La mise en place « d’accords offensifs »
- L’assouplissement des règles relatives au temps de travail
- La rémunération des heures supplémentaires
- L’introduction du référendum d’entreprise
- Le Compte Personnel d’Activité (CPA)
- Le droit à la déconnexion
- Les bulletins de paye électroniques
- La neutralité religieuse en entreprise
- La médecine du travail
- Une meilleure protection des travailleurs saisonniers
- Les congés deuil allongés
Les nouveaux critères du licenciement économique
La loi précise les critères justifiant le recours à un licenciement économique et propose une application différente de ces critères selon la taille de l’entreprise concernée.
Les entreprises qui connaissent une baisse du chiffre d’affaires ou des commandes peuvent recourir à un licenciement économique dès lors que cette baisse dure :
- Plus d’un trimestre pour les entreprises de moins de 11 salariés ;
- Plus de deux trimestres pour les entreprises entre 11 et 49 salariés ;
- Plus de trois trimestres pour les entreprises entre 50 et 299 salariés ;
- Plus de 4 trimestres pour les entreprises de 300 salariés ou plus.
La marge d’interprétation des tribunaux pour apprécier si les motifs invoqués par l’employeur peuvent ou non justifier un licenciement économique s’en trouve réduite, mais n’a pas totalement disparue : le juge devra notamment déterminer l’ampleur de la baisse de nature à entrainer un licenciement économique.
La primauté de la négociation d’entreprise
C’est l’un des articles les plus controversés de la loi. Il prévoit qu’un accord d’entreprise peut remplacer les dispositions d’un accord de branche, même si l’accord d’entreprise est moins favorable aux salariés.
Pour le Premier ministre Manuel Valls, cet article est au cœur de la philosophie de la loi travail : la négociation d’entreprise.
La mise en place « d’accords offensifs »
Les entreprises pouvaient déjà recourir à des accords « défensifs ». Elles peuvent aujourd’hui adopter des accords « offensifs ».
Les premiers, aussi appelés « accords de maintien dans l’emploi » permettent à une entreprise qui connaît de graves difficultés conjoncturelles d’aménager le temps de travail ou la rémunération d’un salarié afin d’assurer le maintien de son emploi.
Un tel aménagement est aujourd’hui possible dans un but de « développement de l’emploi » c’est à dire pour conquérir de nouveaux marchés ou signer de nouveaux contrats.
Un salarié qui refuserait de se voir appliquer l’accord pourra être licencié par son employeur. Le licenciement sera alors qualifié de « licenciement économique ».
L’assouplissement des règles relatives au temps de travail
La durée légale du travail reste de 35 heures, seuil de déclenchement des heures supplémentaires.
La durée maximale quotidienne de travail peut cependant être portée de 10 à 12 heures par accord d’entreprise en cas d’activité accrue. De même, l’accord d’entreprise peut décider d’une moyenne hebdomadaire de 46 heures sur 12 semaines contre 44 auparavant.
La rémunération des heures supplémentaires
La rémunération des heures supplémentaires reste majorée à 25% pour les 8 premières heures et 50% pour les suivantes.
Un accord collectif peut toutefois prévoir un taux de majoration inférieur à celui fixé par la branche, sans pouvoir descendre en dessous de 10%.
L’introduction du référendum d’entreprise
Les syndicats minoritaires (représentant moins de 30% des salariés) peuvent désormais initier des référendums au sein de l’entreprise. Si le référendum est approuvé par plus de 50% des suffrages exprimés, celui-ci sera validé, sans que les syndicats majoritaires ne puissent s’opposer au résultat.
Le Compte Personnel d’Activité (CPA)
La loi El Khomri crée un nouveau dispositif : le Compte Personnel d’Activité. Il s’agit d’un compte ouvert pour chaque personne au début de sa vie professionnelle. Au fil de sa carrière, chaque personne accumulera des droits et pourra décider de leur utilisation (formation, départ anticipé à la retraite…). L’idée est que le CPA couvre tous les travailleurs, quel que soit leur statut (salarié, travailleur indépendant, fonctionnaire, demandeur d’emploi…).
À partir de janvier 2017, toute personne pourra se rendre sur son espace personnel accessible sur internet pour enregistrer et consulter ses droits.
Le droit à la déconnexion
La loi prévoit que les entreprises doivent mettre en place des mesures visant à assurer le respect des congés payés et du temps de repos. Ces mesures doivent être négociées entre les représentants du personnel, les représentants syndicaux et la direction de l’entreprise.
Les bulletins de paye électroniques
Les employeurs sont autorisés à remettre à leurs salariés un bulletin de paye électronique. Pour le moment l’employeur est tenu d’adresser une demande au salarié pour y recourir, celui-ci pouvant s’y opposer.
La neutralité religieuse en entreprise
Le gouvernement a inscrit dans la loi l’autorisation pour les entreprises d’inscrire le principe de neutralité religieuse au sein de leur règlement intérieur.
La médecine du travail
La visite médicale d’embauche est désormais facultative, sauf pour les postes à risques pour lesquels elle demeure obligatoire.
Une meilleure protection des travailleurs saisonniers
La loi El Khomri cherche à aligner le statut des travailleurs saisonniers sur celui des CDD, plus protecteur. Les travailleurs saisonniers pourront par exemple désormais bénéficier d’une prime d’ancienneté.
Les congés deuil allongés
Le congé qu’un salarié peut demander en cas de décès d’un de ses proches est allongé. Il est désormais de 5 jours en cas de décès d’un enfant (au lieu de 2 auparavant) et de 2 jours pour le décès d’un frère, d’une sœur, d’un parent ou d’un beau parent (au lieu de 1 auparavant).
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