Ravis de vous revoir ! Votre démarche a été enregistrée  🚀 Reprendre ma démarche
Reprendre ma démarche
01 83 81 67 25
  1. Ressources
  2. Protéger vos créations
  3. Protéger ses créations
  4. Comment répondre à une opposition de marque ?

Comment répondre à une opposition de marque ?

Me Yoram Kouhana
Écrit par Me Yoram Kouhana. Avocat au Barreau de Paris, spécialisé en droit de la propriété intellectuelle
Relu par Clémence Bonnet.

Lorsque vous déposez votre marque, vous bénéficiez d’un avantage considérable pour votre entreprise.  En effet, une marque déposée vous permet de vous distinguer de vos concurrents sur un même marché de produits et services, de vous rendre visible auprès des consommateurs en l’utilisant notamment dans des campagnes publicitaires, mais aussi de conclure des accords rémunérateurs lorsqu’elle est exploitée par des tiers (ex: dans le cadre d’un contrat de licence de marque). 

Il est donc essentiel de veiller à bien protéger vos droits. Un bon moyen d’y parvenir est de maîtriser la procédure d’opposition à un dépôt de marque car de plus en plus d’entreprises l’utilisent sans réel fondement. Si le dépôt de votre marque fait l’objet d’une procédure d’opposition, rassurez-vous des solutions existent pour vous défendre. Par ailleurs, lorsque votre opposant la met en œuvre, il s’expose à des risques pour sa propre marque.

Alors comment répondre si votre marque fait l’objet d’une procédure d’opposition?

Maître Yoram Kouhana, avocat spécialisé en avocat spécialisé en  droit de la propriété intellectuelle vous explique ce qu’est la procédure d’opposition et quels sont les moyens à votre disposition pour bien l’appréhender. 

 

 

Qu’est-ce que la procédure d’opposition ?

 

L’opposition est une procédure préventive. Elle permet au propriétaire d’une marque antérieure déposée et/ou enregistrée, de s’opposer au déposant d’une nouvelle marque s’il estime que celle-ci porte atteinte à ses droits. 

Les cas d’atteinte sont prévus à l’article L.712-4 du Code de la propriété intellectuelle. Par exemple, cette procédure pourra être enclenchée contre le déposant si sa marque est identique à la marque antérieure ou similaire, c’est-à-dire si elle crée un risque de confusion dans l’esprit du public. De même, c’est le cas lorsque la marque de votre opposant est enregistrée ou jouit d’une renommée. 

La procédure d’opposition est une procédure préventive et non contentieuse. A ce titre, elle ne doit pas être confondue avec l’action en contrefaçon. Ainsi, la procédure d’opposition ne permet pas à l’opposant de réclamer des dommages et intérêts à l’encontre du déposant, quand bien même ce dernier verrait sa demande d’enregistrement refusée. 

Par ailleurs, l’INPI ne prend pas en compte les faits extérieurs dans le cadre de la procédure d’opposition, comme la violation d’un contrat entre des parties ou une problématique de concurrence déloyale. La procédure permet uniquement de comparer les deux marques dont elle fait l’objet.

La procédure étant effectuée directement en ligne auprès de l’INPI, elle est donc moins coûteuse et plus rapide que devant un tribunal. Cette procédure simplifiée pousse de nombreux titulaires de droits antérieurs à introduire ce type de procédure sans réels fondements. Pour éviter tout abus, l’opposant qui utilise cette procédure devra apporter des preuves (dépôt/ usage de ses marques) et exposer des motifs légitimes.  

 

Comment se déroule la procédure d’opposition ?

 

L’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019 élaborée dans la cadre de la loi PACTE est venue modifier en profondeur la procédure d’opposition en droit des marques. 

Celle-ci s’aligne désormais en partie sur la procédure européenne applicable devant l’EUIPO (Office de l’Union Européenne pour la Propriété Intellectuelle) pour les marques de l’Union européenne, tout en conservant quelques spécificités françaises. 

Dans tous les cas, il s’agit d’une procédure écrite et administrative qui a lieu directement en ligne. 

Cette nouvelle procédure s’applique à l’encontre des demandes d’enregistrement déposées à compter du 11 décembre 2019. 

 

L’étendue des droits invocables 

 

C’est l’un des grands changements opérés par l’ordonnance de 2019. 

Auparavant, l’opposant ne pouvait invoquer qu’un seul droit antérieur. Ce champ est désormais élargi à plusieurs droits antérieurs, à condition bien sûr que l’opposant en soit titulaire. 

C’est l’article L.712-4 du Code de la propriété intellectuelle qui précise les différentes antériorités invocables à l’appui d’une procédure d’opposition. Il s’agit  : 
  • “Une marque antérieure en application du 1° du I de l'article L. 711-3 ;
  • Une marque antérieure jouissant d'une renommée en application du 2° du I de l'article L. 711-3 ;
  • Une dénomination ou une raison sociale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ;
  • Un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, dont la portée n'est pas seulement locale, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ;
  • Une indication géographique enregistrée mentionnée à l'article L. 722-1 ou une demande d'indication géographique sous réserve de l'homologation de son cahier des charges et de son enregistrement ultérieur ;
  • Le nom, l'image ou la renommée d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public de coopération intercommunale ;
  • Le nom d'une entité publique, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public”.

 

Toutefois, contrairement à la procédure devant l’EUIOPO, cette possibilité de former une opposition sur plusieurs droits devra s’accompagner du paiement d’une redevance supplémentaire par droit invoqué.

 

La durée et les délais de procédure 

 

La réforme a également bouleversé la procédure d’opposition au regard des échanges entre opposant et déposant. Aujourd’hui, les procédure d’opposition s’articulent autour de deux phases : 

  • la phase d’instruction : pendant laquelle les parties font valoir leurs arguments ; 
  • la phase d’examen : à l’issue de laquelle l’INPI rend sa décision. 

 

L’opposant dispose toujours d’un délai de deux mois suivant la publication de la demande d’enregistrement de la nouvelle marque pour former opposition. 

Toutefois, l’article R.712-14 du CPI permet à l’opposant de bénéficier d’un délai d’un mois supplémentaire suivant la demande d’opposition pour compléter cette demande (opposition formelle). 

À l’issue de ce délai, si l’INPI juge la demande d’opposition recevable, cette dernière est enclenchée et notifiée au déposant. La nouvelle procédure offre à chaque partie la possibilité de s’exprimer trois fois chacune pour présenter et contester les arguments présentés, le tout sur une période de 6 mois au total. 

La phase d’instruction démarre côté déposant qui dispose d'un délai de deux mois pour communiquer à l’opposant ses observations et demander éventuellement des preuves d’usage. 

L’opposant a alors un mois pour contester et présenter les éventuelles preuves d’usages requises. Puis chaque partie pourra contester et présenter ses arguments dans la limite de trois échanges maximum. 

À l’issue de cette phase d’instruction, l’INPI dispose de trois mois pour rendre sa décision. 

Par ailleurs, la durée de la procédure d’opposition varie, notamment si votre avocat ou l’avocat de la partie adverse demande sa suspension. Ce mécanisme permet, en France, de demander le sursis de la procédure pour un maximum de 12 mois. Au sein de l’Union Européenne, le délai est fortement allongé et votre opposant pourra bénéficier d’un sursis dit de “cooling off” d’un maximum de 2 ans, s’il en fait la demande. 

Cette suspension a pour objectif de permettre la négociation entre les parties. En pratique, une opposition pourra être réglée à l’amiable en concluant par exemple des accords de coexistence de marque visant à définir les limites de l’usage de la marque par le déposant. Des limites peuvent être négociées en retravaillant notamment les libellés de la marque : supprimer certains produits ou services non essentiels au déposant, prévoir des finalités différentes comme des produits destinés à des cibles ou des secteurs différents.

En cas de dépassement des délais indiqués, l’opposant ne pourra plus bénéficier de cette action préventive. En revanche, il disposera toujours de l’action en contrefaçon pour faire valoir ses droits et pourra toujours agir en justice sur d’autres fondements (action judiciaire en interdiction ou en indemnisation).

 

La demande de preuves d’usage de la marque antérieure

 

Il s’agit là encore d’une nouveauté liée à l’ordonnance de 2019. L’article L712-5-1 du CPI précise désormais que l’opposition fondée sur une marque antérieure enregistrée depuis plus de cinq ans sera rejetée si l’opposant ne parvient pas à établir : 

  • que sa marque a fait l'objet, pour les produits ou services sur lesquels est fondée l'opposition, d'un usage sérieux au cours des cinq années précédant la date de dépôt de la demande d'enregistrement contestée ;
  • qu’il ne dispose pas de motifs légitimes pour son non-usage

 

De plus, il appartient désormais à l’opposant de rapporter la preuve et de justifier l’usage de sa marque pour chaque produit et service invoqué. L’opposant dispose d’un mois pour rapporter ces preuves, raison pour laquelle il est fortement recommandé de conserver des preuves d’usages tout au long de la vie de l’entreprise afin d’être en mesure de les produire et les communiquer rapidement en cas de besoin. 

 

Comment se défendre face à une procédure d’opposition ?

 

Analyser les actions en riposte à votre disposition 

 

Les preuves et motifs de votre opposant sont-ils suffisants ?

 

Si votre marque fait l’objet d’une procédure d’opposition, votre opposant devra apporter les preuves de la titularité de sa marque antérieure, notamment le certificat d’enregistrement ou du dépôt de sa marque. Il devra également fournir une copie de la publication de votre marque puisqu’il souhaite la contester. S’il n’apporte pas des preuves suffisantes, cela peut être risqué pour votre opposant qui attire l’attention sur sa propre marque et s’expose à des ripostes de la part du déposant.

Par ailleurs, observez bien les motifs exposés dans l’opposition. Le plus souvent, il s’agit d’une stratégie purement défensive de la part d’un titulaire de droits et en réalité les motifs ne sont pas fondés ou partiellement fondés. 

Enfin, si votre marque est attaquée pour une classe de produit et service que vous n’exploitez pas, il sera peut-être opportun de ne pas vous lancer dans une telle bataille puisque vous serez alors concerné par un défaut d’usage sérieux de votre marque quoi qu’il en soit en cas de litige.

 

Avez-vous des actions en riposte à lui opposer ?

 

Si votre opposant n’apporte pas des preuves suffisantes de la distinctivité de sa marque ou de son exploitation, il s’expose soit à ce que sa demande soit invalidée par l’INPI, ce qui lui aura valu de dépenser des ressources et de voir sa stratégie de défense remise en cause, soit sa marque pourra faire l’objet d’une action en risposte de votre part.

En effet, dans cette hypothèse, vous pourrez riposter par le biais d’une action en déchéance de la marque antérieure si celle-ci n’a pas fait l’objet d’un usage sérieux dans les 5 ans suivant la date de dépôt ou la date de priorité de votre marque. Vous pourrez aussi intenter une action en nullité pour obtenir l’annulation de la marque antérieure si les marques s’avèrent être dépourvues de caractère distinctif. 

 

Osez discuter avec votre opposant

 

En cas de procédure d’opposition, n’hésitez pas à communiquer avec votre opposant par le biais d’une procédure amiable. En effet, la plupart des procédures engagées par des sociétés sont dépourvues de fondements notamment au vu du critère de similarité des produits et services ou bien du risque de confusion. 

Le fait d’entamer une procédure amiable est également très utile si vous avez dépassé les délais pour la procédure d’opposition ou que votre opposant souhaite faire traîner la procédure (suspension des délais ou cooling-off). Négocier avec votre opposant vous permettra ainsi de gagner un temps précieux et d’assurer la pérennité de votre stratégie commerciale.

 

Ne négligez pas votre réponse

 

Lorsque la procédure d’opposition est lancée, vous serez notifié de l’action de votre opposant. Il vous faudra alors être en mesure de répondre aux motifs exposés en faisant part de vos arguments. L’idée est notamment de réussir à justifier que votre marque ne porte pas atteinte aux droits de votre concurrent et n'entraîne pas non plus un risque de confusion. Pour cela, il est important que vous répondiez à cette notification dans les 2 mois au risque que l’INPI prenne sa décision sans consulter vos arguments. 

Par ailleurs, il est important de répondre à chaque motif exposé par votre opposant car l’absence de réponse sur certains points risquerait de vous empêcher de déposer votre marque dans certaines catégories de produits et services. 

La procédure d’opposition n’est pas anodine et peut avoir un impact sur votre activité commerciale. Si la procédure d’opposition à laquelle vous faîtes face aboutie, l’enregistrement de votre marque sera annulé et vous devrez donc procéder à un nouveau dépôt auprès de l’INPI avec un nom et des catégories de produits et services distincts. Cela vous empêchera donc d’obtenir un monopole d’exploitation sur des produits et services stratégiques pour votre entreprise.

 

Pourquoi faire appel à un avocat spécialisé ?

 

Si votre marque fait l’objet d’une procédure d’opposition, un avocat spécialisé pourra vous accompagner dans vos démarches. Cela est recommandé, notamment dans le cadre de la procédure d’opposition d’une marque française, compte tenu des délais très courts.

L’avocat pourra identifier les chances de succès de l'opposition. Cela nécessite de prendre en compte des critères complexes permettant d’évaluer si votre marque est identique ou similaire à la sienne (sur le plan visuel, phonétique, conceptuel et sur la base des catégories de produits et services visés dans les motifs). Cette analyse nécessite la maîtrise des décisions rendues par les juges dans de nombreuses affaires, ce qui correspond à la jurisprudence applicable, pour déterminer la position la plus probable qui sera retenue par l’INPI.

Par ailleurs, l’avocat envisagera également les opportunités d’entamer des négociations ou non avec votre opposant. Cette démarche est très utile pour remédier à une situation et convenir d’un compromis avec votre opposant notamment en concluant un accord de coexistence, voire un protocole d’accord transactionnel. En effet, il n’est pas toujours nécessaire de s’en remettre à la décision de l’INPI et il est possible de trouver un terrain d’entente en évaluant vos forces et vos faiblesses.

En cas d’échec d’une solution amiable, la procédure d’opposition nécessitera l’audition des parties, ce qui signifie que chacune devra présenter ses arguments oralement. Un avocat habitué à ce type de procédure sera alors plus à même de convaincre l’INPI de votre bien fondé.

Enfin, les enjeux sont considérables et auront des impacts sur le droit et la portée de l’usage de la marque en France ou à l'international. Il est recommandé d’évaluer vos moyens d’action face à cette procédure avec votre avocat, d’autant que ces enjeux s’imposeront également à l’acquéreur de votre société. 

 

 

Me Yoram Kouhana
Écrit par Me Yoram Kouhana

Avocat au Barreau de Paris, spécialisé en droit de la propriété intellectuelle et des nouvelles technologies, Me Yoram Kouhana assiste ses clients dans la création, protection, valorisation et défense de leurs actifs immatériels (data, marques, brevets, logiciels, sites Internet etc.). Il compte sur une forte pratique internationale : il sécurise l'ouverture de nouveaux pays : recherches d'antériorité, dépôts, rachats d'actifs, rédaction et négociation de contrats etc. Il a également une appétence pour les contentieux internationaux ou stratégiques.

Relu par Clémence Bonnet. Diplômée de l'École des Avocats
Cet article vous a-t-il été utile ?
Besoin de protéger vos créations et innovations ?
J'échange avec un avocat

Tous les articles similaires

Consultez nos articles pour parfaire vos connaissances