Vous êtes à la tête d’une entreprise depuis plusieurs mois, voire plusieurs années et votre activité ne cesse de se développer ? Votre concept est une réussite au point de séduire d’autres entrepreneurs et les inciter à se lancer ? C’est donc naturellement que vous envisagez d’étendre plus largement votre activité en créant votre propre réseau de franchise.
La franchise est un mode de collaboration apprécié par de nombreux entrepreneurs français. En effet, le marché français de la franchise a doublé ces 10 dernières années et a généré 67,8 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2019.
Ce succès est dû à plusieurs raisons. Tout d’abord, le système de la franchise permet au franchiseur de conquérir rapidement un marché et de développer la notoriété de sa marque et de son enseigne, notamment en augmentant le nombre de points de vente et les moyens de communication. La construction d'un réseau de franchise fait par ailleurs bénéficier de la dynamique d'un réseau d'entrepreneurs juridiquement et financièrement indépendants.
Cela dit, le marché de la franchise, présent dans de nombreux secteurs (alimentation, équipement de la personne, esthétique, restauration, hôtellerie, bâtiment, automobile…), est aussi très concurrentiel et soumis à une réglementation très stricte. Il est donc essentiel de savoir se démarquer tout en sécurisant le réseau avec un arsenal juridique solide.
Enfin, et surtout, devenir franchiseur est un travail de longue haleine qui suppose de suivre une multitude d’étapes. Mais alors quelles sont-elles ? Comment réussir votre projet d’ouverture de réseau de franchise ?
Avoir un concept innovant bien défini
La réussite d’un projet entrepreneurial suppose au départ de penser un concept bien précis et de prendre le temps d’en définir les contours.
En l'occurrence, avant de pouvoir ouvrir votre réseau de franchise, il faut que votre concept ait déjà fait ses preuves. Il doit être original et innovant.
L’avantage est que vous pouvez vous lancer en franchise dans n’importe quel secteur d’activité. Sachez toutefois que la franchise est très plébiscitée dans certains domaines d’activités, comme l’alimentation, l’esthétique, l’automobile ou encore l’immobilier.
Dans les faits, je suggère toujours à mes clients de s’imprégner de ce qui existe ou de ce qui n’existe pas encore sur le marché de la franchise. Pour cela, n’hésitez pas à vous rendre aux différents salons de la franchise qui sont organisés chaque année.
Concrètement, pour avoir un concept innovant bien défini et passer à l’étape suivante, il vous faut commencer par :
- déterminer les produits que vous souhaiteriez vendre et/ou les services que vous souhaiteriez proposer ;
- définir votre marque et votre enseigne en gardant à l’esprit que l’objectif est d’acquérir et de développer une grande notoriété et renommée ;
Réaliser une étude de marché
Là encore, il s’agit d’une étape commune à tous ceux qui envisagent de créer un réseau de franchise. Il vous faut impérativement réaliser une étude de marché afin de vous assurer de la faisabilité de votre projet.
Comme son nom l’indique, l’étude de marché vous permet d’évaluer le marché de la franchise, plus précisément de connaître les tendances qui existent en matière de réseau de franchise et éventuellement les opportunités qui se profilent.
Aussi, vous devez prendre le soin d’analyser la concurrence dans votre étude de marché. Quels sont les acteurs présents ? Quels types de produits et/ou services proposent-ils ? Quel est leur positionnement tarifaire ? Il vous faut à tout prix disposer d'un concept modélisé et d'un savoir-faire original qui se différencient de la concurrence.
Et pour compléter votre étude de marché, il est important d’identifier avec précision votre clientèle cible : particuliers, entreprises, démographie visée, consommateurs, professionnels, etc.
La réalisation d’une étude de marché vous permettra in fine d’établir une stratégie commerciale adaptée à votre savoir-faire.
Établir un business plan
Autre document indispensable à la réussite de votre projet : le business plan lors du lancement de votre concept en propre. Il vous permet de vérifier la rentabilité financière de votre concept et sert à convaincre vos banques et autres partenaires de vous suivre dans les premières étapes de cette aventure entrepreneuriale.
Il est donc essentiel de bien préparer votre business plan, d’où l’intérêt bien souvent de faire appel à un professionnel pour vous aider à le rédiger.
Votre business plan doit vous servir à présenter votre projet : votre concept, votre analyse du marché de la franchise, le modèle économique sur lequel vous vous appuyez, votre stratégie marketing, votre stratégie communication, etc. De fait, il n’existe pas de modèle-type de business plan.
Ce document devra également contenir les chiffres clés de votre projet, comme :
- les frais d'investissement : achat ou location d’un local commercial, achat du matériel, du mobilier et du stock, création de la société, expérimentation du concept, développement du réseau, assistance et formation des franchisés ;
- un bilan prévisionnel ;
- un compte de résultat prévisionnel ;
- le budget de trésorerie ;
- un plan de financement.
Expérimenter son concept dans une unité pilote
Une fois que vous savez votre concept exploitable et rentable, il vous faut le tester dans une ou plusieurs unité(s) pilote(s) afin de le valider et si besoin de le modéliser. L’idée est de confronter votre modèle conceptuel à la réalité du marché.
Concrètement, vous devez créer un point de vente physique destiné à être un véritable laboratoire d’expérimentation.
Pour valider votre concept et envisager la création de points de vente en franchise, il faut vous rapprocher le plus possible des conditions d’exploitation réelles. Autrement dit, votre unité pilote doit contenir les caractéristiques que vous souhaitez dupliquer à vos franchisés : emplacement, prix, fournisseurs, ressources humaines,...
Le succès préalable d’une unité pilote est indispensable pour garantir la maîtrise d’un savoir-faire par le franchiseur. Ensuite, il s’agit d’une bonne vitrine pour le franchiseur, notamment pour convaincre les candidats intéressés de rejoindre le réseau.
Protéger et développer sa marque
Dans le cadre d’une collaboration en franchise, le franchiseur ne transmet pas uniquement son savoir-faire ; il accorde également à ses partenaires franchisés le droit d’utiliser sa marque.
Mais encore faut-il que la marque bénéficie d’une protection légale. En effet, dans le contrat de franchise, vous devez assurer à vos franchisés que vous avez bien effectué un dépôt de marque et en êtes le titulaire. Vous devrez pour cela avoir procédé à une recherche d’antériorité afin de vérifier la disponibilité de la marque, puis procéder à l’enregistrement de celle-ci auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).
Mais les efforts ne s’arrêtent pas là. Il vous faudra, tout au long de votre collaboration de franchise, travailler la renommée de votre marque et de votre enseigne, ainsi qu’en assurer la protection et l’existence tout au long de la relation de franchise. N’oubliez pas que c’est une des raisons pour lesquelles vos franchisés ont adhéré à votre projet. Pour y arriver, d’importants moyens de communication, aussi bien humains, matériels que financiers devront être investis.
Pour accomplir toutes ces démarches et donc garantir le bon développement de votre marque, il est fortement recommandé de se faire accompagner par un professionnel du droit.
Rédiger la documentation nécessaire à la mise en place de son réseau de franchise
Comme indiqué précédemment, la réglementation en matière de franchise est très dense. Trois documents sont indispensables à la mise en place d’un réseau de franchise : le manuel opératoire (ou encore manuel du savoir-faire), le Document d’Information Précontractuel (DIP) et le contrat de franchise.
Le manuel opératoire
Devenir franchiseur nécessite de décrire précisément votre savoir-faire afin de pouvoir le transmettre. Le manuel opératoire est précisément le document par lequel le franchiseur matérialise par écrit son savoir-faire. Ce document, confidentiel, a une vocation notamment pédagogique.
Concrètement, le manuel opératoire permet à vos franchisés de mettre en oeuvre vos méthodes et procédures afin de répliquer votre concept. Il recouvre des sujets extrêmement variés comme les ressources humaines, le marketing, le management, la production, les techniques de vente, la comptabilité, le décor des locaux, etc.
Ce manuel opératoire est amené à évoluer. Ainsi, vous devez tenir compte des remontés de vos franchisés pour améliorer votre concept, tout en continuant d’observer les évolutions du marché, de la concurrence et de la législation.
Le Document d’Information Précontractuel ou DIP
Obligatoire depuis la loi Doubin de 1989, le DIP est le document permettant au franchisé de signer le contrat de franchise en toute connaissance de cause. Le franchiseur doit le lui remettre au moins 20 jours avant la signature dudit contrat.
Que doit mentionner ce DIP ? Quels sont les éléments qui permettront au franchisé de prendre la décision de rejoindre votre réseau de franchise ?
Le DIP doit notamment contenir les éléments suivants :
- la carte d’identité de votre entreprise : adresse, nature des activités, forme juridique, identité du dirigeant, montant du capital social, numéro RCS, comptes annuels des deux derniers exercices,... ;
- la carte d’identité de votre marque : date de dépôt de la marque, numéro d'enregistrement,... ;
- l’historique de votre enseigne (s’il en existe un) : nombre de franchisés, entrées et sorties de réseau, évolutions du réseau, présentation de l’expérience professionnelle acquise par le franchiseur,...
- une étude générale du marché et un état local du marché (spécifique au territoire qui serait consenti au candidat à la franchise) et les perspectives de développement ;
- les informations relatives au contrat de franchise projeté : durée, conditions de renouvellement, de résiliation et de cession ;
- une présentation des investissements nécessaires : nature des dépenses, montant des dépenses.
Le contrat de franchise
Le contrat de franchise fixe les droits et obligations du franchiseur et du franchisé.
Il doit contenir des clauses essentielles comme la durée du contrat, les conditions de son renouvellement, la concession de licence de marque, les modalités de transmission du savoir-faire du franchiseur, les modalités de l’assistance fournie au franchisé, la clause de confidentialité, etc.
Citons quelques clauses méritant une attention toute particulière :
Les conditions financières
En contrepartie de la transmission de votre savoir-faire et de l’exploitation de votre marque, les franchisés doivent vous verser un droit d’entrée et des redevances.
Les montants du droit d’entrée et des redevances doivent être économiquement viables pour les deux parties : pour que vous ayez les moyens de faire vivre votre marque et d'élever votre réseau et pour que votre franchisé puisse rentabiliser son investissement.
La clause de propriété intellectuelle
La clause de propriété intellectuelle est la clause par laquelle le franchiseur accorde au franchisé la licence de sa marque.
Cette clause a également pour objet de définir les engagements et obligations respectifs des parties concernant l’entretien et la protection de la marque.
Les clauses d’approvisionnement
Les clauses d’approvisionnement peuvent désigner des fournisseurs exclusifs ou recommandés.
Ces clauses doivent en particulier très précisément délimiter le champ des produits faisant l’objet d’une obligation d’exclusivité, ainsi que de ce qui peut relever de la liberté du franchisé.
La clause dite d’intuitu personae
Un contrat de franchise est par ailleurs un contrat dit « intuitu personae », c’est-à-dire que c’est un contrat conclu en considération des qualités personnelles du porteur du projet en franchise (l’actionnaire majoritaire de la société franchisée par exemple). A noter que cet intuitu personae n’est pas réciproque.
Cette condition doit demeurer respectée pendant toute la durée du contrat de franchise.
Les clauses de non-concurrence et de non-affiliation
Les clauses de non-concurrence et de non-affiliation dans le contrat de franchise est extrêmement importante pour le franchiseur. En empêchant au franchisé d’exercer une activité semblable à celle du réseau ou de s’affilier à un réseau concurrent, elles permettent au franchiseur de protéger son savoir-faire.
La clause de non-concurrence fait l’objet notamment d’un encadrement par la loi dite Macron du 6 août 2015. Elle doit :
- concerner des biens et services en concurrence ;
- être limitée aux terrains et locaux à partir desquels le franchisé exerce son activité pendant la durée du contrat ;
- être indispensable à la protection du savoir-faire substantiel, spécifique et secret transmis dans le cadre du contrat de franchise ;
- ne pas excéder une durée d'1 an après le terme ou la cessation anticipée du contrat.
Les obligations des parties à la cessation du contrat
Les conséquences de l’expiration ou de la cessation anticipée du contrat doivent clairement définir les obligations du franchisé à l’issue de la relation contractuelle.
Ces obligations ont en particulier trait à la « dépersonnalisation » du point de vente du franchisé.
La loi applicable et le tribunal compétent
Il convient de rappeler qu’en matière de contrats commerciaux, les parties sont libres de déterminer la loi applicable au contrat et le tribunal (judiciaire ou arbitral) compétent en cas de litige.
Il ne faut jamais négliger ce point, qui peut être déterminant notamment en cas de litige.
Le contrat de franchise est propre à chaque enseigne. Prenez le temps de bien le personnaliser.
Préparer le lancement du réseau de franchise
Avant de pouvoir lancer votre réseau de franchise, il vous faut encore accomplir quelques étapes essentielles : recruter vos premiers franchisés, élaborer un plan de formation initiale, mettre en place une assistance continue et une structure d’animation,...
Le recrutement de vos franchisés
Avant de recruter vos premiers franchisés, prenez le soin de bien définir en amont le profil type du franchisé que vous souhaitez voir intégrer votre réseau.
En effet, une erreur de recrutement peut rapidement nuire à l’image de votre réseau ! A l’inverse, si vous parvenez à embaucher des franchisés investis et compétents, cela ne pourra que contribuer à valoriser votre marque et votre enseigne auprès de vos clients et partenaires.
Pour recruter vos franchisés, n’hésitez pas à vous rendre aux salons de la franchise qui se tiennent chaque année en France (Franchise Expo Paris, Top Franchise Méditerranée, etc) et à consulter sur les sites Internet et magazines spécialisés (Franchise Magazine, L’Observatoire de la Franchise, etc).
La formation initiale de vos franchisés
En tant que franchiseur, vous avez vocation à transmettre votre savoir-faire à vos franchisés afin que ces derniers soient capables de reproduire votre concept avec le même succès que celui constaté au sein de l’unité pilote. C’est tout l’objet de la formation initiale.
Pour ce faire, il vous faut d’abord établir le contenu de la formation. Vos futurs franchisés doivent tout connaître de votre concept : l’organisation de votre réseau, vos produits et/ou services, vos besoins en terme d’aménagement des locaux, votre stratégie marketing, votre démarche communication,... Ils doivent également être informés sur la gestion en entreprise (comptabilité, juridique, finance, ressources humaines, etc).
Si la théorie est un indispensable, je recommande très souvent à mes clients de miser sur la pratique. Mettez en place des ateliers, des stages en unité pilote ou en point de vente, des contrôles de connaissances, etc.
Il vous faut ensuite recruter avec soin des formateurs capables de transmettre votre savoir-faire à vos franchisés et de valider leur formation.
La fourniture d’une assistance continue aux franchisés
Le franchiseur est tenu de fournir une assistance technique et/ou commerciale à ses franchisés pendant la durée du contrat de franchise. Il s’agit d’une obligation légale qui est due en contrepartie du versement des redevances.
Bien que le contenu de l’assistance varie selon les réseaux de franchise, il comprend, de manière générale :
- la formation initiale ;
- une ou plusieurs formation(s) continue(s) ;
- un accompagnement à l’ouverture du point de vente ;
- une assistance juridique, financière et informatique ;
- un conseil commercial et marketing ;
- une aide au recrutement des salariés ;
- etc.
Si l’assistance sert en premier lieu les franchisés, elle permet également au franchiseur d’élever son réseau de façon pérenne.
La mise en place d’une structure d’animation
La mise en place d’une structure d’animation au sein d’un réseau de franchise permet de faciliter la communication entre les franchisés et l’enseigne.
Le but est donc de permettre la circulation des informations. Par exemple, le franchiseur peut échanger sur la politique de marketing. A l’inverse, les franchisés peuvent faire remonter les différents problèmes décelés sur leurs points de vente.
Si vous ne pouvez assurer l’animation, il est fortement recommandé de recruter une équipe dédiée à l’animation de votre réseau.
Vous l’aurez compris, la création d’un réseau de franchise est un processus particulièrement complexe. Un avocat exerçant en droit de la franchise peut vous accompagner à chaque étape de votre projet : créer en toute sécurité votre unité pilote, négocier et à rédiger un contrat de franchise sur-mesure, etc.
Une question ? Laissez votre commentaire