L’insuffisance professionnelle renvoie à la situation dans laquelle un employé n’a pas les compétences nécessaires pour remplir sa mission. Dans de telles circonstances, il est possible pour l’employeur de procéder à un licenciement pour insuffisance professionnelle.
Vous êtes employeur et l’un de vos salariés ne semble pas avoir les capacités pour réaliser la mission pour laquelle vous l’avez engagé ? Vous vous interrogez sur la procédure à suivre en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle ?
- Le licenciement pour insuffisance professionnelle : qu’est-ce que c’est ?
- Les cas d'exclusion du recours au licenciement pour insuffisance professionnelle
- Les conditions du licenciement pour insuffisance professionnelle
- La procédure à suivre
- Quelles indemnités pour le salarié ?
- La question de la preuve
- La responsabilité de l'employeur
- Le rôle de l'avocat spécialisé
Le licenciement pour insuffisance professionnelle : qu’est-ce que c’est ?
Le licenciement pour insuffisance professionnelle est une rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur. Sans que l’employé n’ait commis aucune faute, l’idée est que ce dernier n’a pas les compétences nécessaires à l’accomplissement de la mission pour laquelle il a été engagé.
Cette insuffisance professionnelle peut se manifester de plusieurs manières, parmi lesquelles :
- Erreurs à répétition ;
- Travail insuffisant ou de mauvaise qualité ;
- Problèmes de désorganisation ou de ponctualité ;
- Inadaptation professionnelle…
Lorsqu’un employeur décide de rompre le contrat de travail d’un de ses employés pour insuffisance professionnelle, il doit suivre la procédure du licenciement pour motif personnel, à distinguer du licenciement pour faute et du licenciement pour motif économique.
Il convient également de distinguer l’insuffisance professionnelle de l’insuffisance de résultat, qui renvoie à l’incapacité de l’employé à atteindre les résultats fixés. Contrairement à l’insuffisance professionnelle, ce n’est pas en soi une cause valable de licenciement.
L’article L1232-1 alinéa 2 du Code du travail prévoit que tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Ainsi, la décision de l’employeur doit se fonder sur des éléments liés directement au comportement ou aux capacités du salarié. La cause réelle et sérieuse doit reposer sur des faits réels, être précise et vérifiable et être suffisamment importante pour justifier le licenciement.
Les cas d'exclusion du recours au licenciement pour insuffisance professionnelle
Selon le Code du travail, tout licenciement pour motif personnel est motivé et doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. La Cour de cassation a admis l’insuffisance professionnelle comme cause réelle et sérieuse de licenciement.
Pour pouvoir soulever une insuffisance professionnelle, l’employeur doit apprécier les faits fautifs aux vues des circonstances. Le juge admet deux formes d’insuffisance professionnelle : le manque de compétence et l’insuffisance de résultat (incapacité/conjoncture), qui sont des comportements portant préjudice à l’employeur.
Le juge estime que ces deux motifs sont constitutifs d’une cause réelle et sérieuse de licenciement pour insuffisance professionnelle, et ne constituent pas une faute sauf si le comportement du salarié est de nature intentionnelle.
Une fois le licenciement justifié (cause réelle et sérieuse établie), le juge recherche s’il s’agit bien d’un licenciement pour insuffisance professionnelle en s’attachant à un ensemble d’indices : conditions de travail du salarié, adéquation entre son expérience et les missions qui lui sont confiées, etc.
En tant qu’employeur, vous devez apprécier les faits de façon objectifs, précis et circonstanciés. Vous pouvez démontrer une insuffisance professionnelle à travers deux catégories d’événement :
- Faits quantitatifs : dégager une insuffisance de résultat au regard des objectifs qui ont été fixés au salarié (ex : salarié ayant commis des dommages sur un chantier après ne pas avoir rempli les tâches lui ayant été confiées, lesquelles correspondaient à sa qualification professionnelle). L’insuffisance liée à une conjoncture ne suffit pas, il faut également que les baisses de résultats soient réalistes et déterminées.
- Faits qualitatifs : l’employeur se base sur les traits de la personnalité de son salarié qui seraient incompatibles avec l’exercice de ses fonctions (ex : un employé ne parvenant pas à se faire respecter par ses subordonnés).
Pour finir, le Code du travail impose à l’employeur d’avoir recours à des méthodes d’évaluation pertinentes et transparentes en lien avec l’emploi occupé.
Les conditions du licenciement pour insuffisance professionnelle
Pour être considéré comme valable, un licenciement pour insuffisance professionnelle doit satisfaire plusieurs conditions. La validité de la décision de l’employeur va être analysée au cas par cas, en tenant compte des éléments suivants :
- La réalité du motif avancé par l’employeur pour justifier le licenciement pour insuffisance professionnelle ;
- La vérification que le salarié ne se trouve pas dans un des cas d’exclusion mentionné ci-dessus ;
- L’analyse des conditions de travail (Cass. soc. 18 mai 2011) et des tâches confiées au salarié, qui doivent correspondre à celles pour lesquelles il a été embauché et relever de ses compétences (Cass. soc. 2 février 1999) ;
- Le respect de la procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle.
La procédure à suivre
La procédure à suivre par l’employeur désirant licencier l’un de ses salariés pour insuffisance professionnelle est très encadrée. Il existe 4 étapes à suivre pour garantir la validité du licenciement :
- D’abord, l’employeur doit convoquer le salarié à un entretien préalable. L’article L1232-2 du Code du travail prévoit en effet que la convocation doit être faite par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre doit indiquer l’objet de la convocation et avoir été transmise au salarié au minimum 5 jours ouvrables avant l’entretien préalable ;
- Vient ensuite l’étape de l’entretien préalable, au cours duquel l’employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié (article L1232-3 du Code du travail). Le salarié peut se faire assister de la personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise (article L1232-4 du Code du travail) ;
- Si l’employeur décide finalement, à la suite de l’entretien préalable, de licencier le salarié, il doit alors lui faire parvenir par lettre recommandée avec accusé de réception la lettre notifiant le licenciement pour insuffisance professionnelle (article L1232-6 du Code du travail). Cette lettre doit contenir le ou les motifs ayant conduit l’employeur à rompre le contrat de travail et doit être envoyée 2 jours après l’entretien.
- Enfin, le salarié doit respecter sa période de préavis. En effet, si son licenciement est effectif dès réception de la lettre le lui notifiant, il a l’obligation de poursuivre ses fonctions jusqu’à la fin du préavis, qui peut durer d’1 à 2 mois selon son ancienneté. Il peut être décidé, par écrit, que le salarié sera dispensé de préavis, en contrepartie d’une indemnité.
Quelles indemnités pour le salarié ?
Le licenciement pour insuffisance ne suppose aucune faute de la part du salarié. Ainsi, ce dernier a le droit aux indemnités prévues en cas de licenciement pour motif personnel. L’employeur devra verser à l’employé concerné :
- L’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement (article 1234-9 du Code du travail) ;
- L’indemnité compensatrice de préavis ;
- L’indemnité compensatrice de congés payés ;
- L’assurance chômage ;
- Enfin, le cas échéant, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La question de la preuve
Dans le cadre du licenciement pour insuffisance professionnelle, la charge de la preuve pèse sur l’employeur. C’est donc ce dernier qui doit apporter les preuves justifiant la rupture du contrat de travail, en présentant des faits précis et vérifiables.
Ce sera ensuite au salarié, s’il le souhaite, de se défendre en tentant de prouver :
- Qu’il n’existe aucune insuffisance professionnelle ;
- Que les conditions nécessaires à la validité du licenciement pour cause professionnelle ne sont pas réunies ;
- Que les preuves apportées par l’employeur ne sont pas valables.
La responsabilité de l'employeur
Au cours d’une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle, la responsabilité de l’employeur dans la situation ayant conduit à la rupture du contrat de travail du salarié est systématiquement vérifiée.
L’article L6321-1 du Code du travail prévoit en effet que l’employeur doit assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail, veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, proposer des formations participant au développement des compétences.
Ainsi, en cas de non-respect par l’employeur de ses obligations, le licenciement pour insuffisance professionnelle ne pourra pas être considéré comme valable.
Le rôle de l'avocat spécialisé
Si vous êtes employeur et que vous envisagez de licencier l’un de vos salariés en raison d’une insuffisance professionnelle, il est grandement conseillé de se faire accompagner par un avocat spécialisé. En effet, il s’agit d’une procédure strictement encadrée et qui peut se révéler assez complexe.
L’aide d’un expert vous sera alors précieuse afin de vous assurer de la validité de la rupture du contrat de travail.
- Le licenciement pour insuffisance professionnelle n’est pas un licenciement pour faute.
- Il renvoie à l’idée que le salarié n’a pas les compétences nécessaires pour correctement accomplir sa mission.
- Il existe des cas dans lesquels le licenciement pour insuffisance professionnelle est exclu.
- Une procédure en quatre étapes doit être scrupuleusement suivie afin que le licenciement soit valable.
- Le salarié n’étant pas fautif, il aura droit à être indemnisé.
- La charge de la preuve pèse sur l’employeur, qui devra démontrer l’insuffisance reprochée au salarié par des éléments précis et vérifiables.
- La rupture du contrat de travail ne sera pas valable dès lors que l’employeur a une certaine responsabilité dans l’insuffisance professionnelle reprochée à son salarié.
- L’assistance d’un avocat spécialisé constitue, pour l’employeur souhaitant se séparer de l’un de ses salariés pour insuffisance professionnelle, une aide précieuse.