La location de locaux à usage commercial est strictement encadrée par le Code de commerce. Ainsi, le régime du bail commercial est très protecteur pour le locataire. La loi prévoit qu'un bail commercial ne peut être conclu pour une durée inférieure à neuf ans. Cependant, le locataire et le bailleur ont la possibilité de conclure un bail dérogatoire (ou bail précaire) pour échapper aux règles strictes des baux commerciaux. Ce bail, dont la durée ne peut excéder trois ans, est une alternative au bail classique dont la longue durée peut parfois apparaître comme contraignante aux yeux des parties. Dans cet article, Captain Contrat vous explique les caractéristiques du bail dérogatoire et comment le rédiger.
Qu'est-ce que le bail dérogatoire ?
Il existe plusieurs types de baux pour la location d’un local d’exploitation professionnelle. Chacun de ces baux a vocation à régir des situations différentes :
- Le bail commercial classique : c'est le régime qui s'applique par principe si l'activité du locataire est commerciale, artisanale ou industrielle. Il est conclu pour une durée de neuf ans minimum.
- Le bail professionnel : ce régime réservé à l’exercice d’une profession libérale. Sa durée est fixée à six ans minimum.
- Le bail dérogatoire (bail précaire) : il constitue une alternative au bail commercial classique. Il ne peut être conclu que sous certaines conditions et sa durée ne peut excéder trois ans.
- Le bail saisonnier : ce régime est une forme de bail précaire conclu pour la durée d’une saison touristique. Le bail saisonnier doit toutefois être distingué du bail dérogatoire, car sa durée ne peut dépasser six mois.
Le bail commercial de droit commun impose une durée de location minimum de 9 ans. On parle également de bail 3-6-9, car le locataire peut demander la résiliation du bail à chaque période triennale.
Cette convention engage les parties sur le long terme, et ne se prête pas nécessairement à tous types d’activité. C’est pourquoi la loi Pinel du 18 juin 2014 a aménagé le régime spécifique du bail dérogatoire qui permet d'échapper à cette règle des 9 ans.
Le bail dérogatoire (ou bail précaire) est notamment adapté dans les cas de figure suivants :
- Dans le cadre d’une opération commerciale, le professionnel envisage l’ouverture éphémère d’un « pop-up store » ;
- Dans le cadre du lancement d’une nouvelle activité, le professionnel souhaite tester sans risque une zone de chalandise ;
- Dans le cadre d’une activité saisonnière ;
- Le professionnel connait un développement rapide de son activité et envisage de déménager à court terme dans un local plus grand.
Avantages pour le bailleur : le bail précaire est adapté au propriétaire qui souhaite conserver la possibilité de disposer librement de son local sur le court terme.
Quelles sont les clauses indispensables du bail dérogatoire ?
Les conditions du bail dérogatoire sont fixées par l’article L. 145-5 du Code de commerce.
Les conditions pour conclure le contrat
Le contrat de bail précaire doit mentionner de manière explicite la renonciation du locataire et du bailleur au régime de droit commun des baux commerciaux. Il doit être clairement fait mention de leur assujettissement au bail dérogatoire prévu par l’article L. 145-5 du Code de commerce.
De plus, le locataire et le bailleur ont l’obligation de procéder à un état des lieux à l’entrée ainsi qu’à la fin du bail de courte durée.
Si les parties ne parviennent pas à faire un état des lieux à l’amiable, le locataire ou le bailleur devra requérir l’intervention d’un huissier de justice. Les frais sont partagés à parts égales entre le locataire et le bailleur.
Un locataire et un bailleur ne peuvent pas conclure bail dérogatoire s'ils étaient liés par un contrat de bail commercial classique sur le même local.
Durée et renouvellement du bail dérogatoire
- Aucune durée minimum n’est imposée.
- Les parties fixent librement la durée du bail dérogatoire, dans la limite de 3 ans.
- Les parties peuvent renouveler le bail dérogatoire d’un commun accord, dans la limite d’une durée totale de 3 ans. Attention : une clause qui stipulerait que le bail est reconduit automatiquement à l’issue des 3 années est prohibée. Dans ce cas de figure, le bail peut être requalifié en bail classique 3-6-9.
- Le locataire n’a aucun droit au renouvellement du bail : le renouvellement du bail doit être consenti par les 2 parties dans la limite de 36 mois au total. Si le bailleur refuse le renouvellement du bail précaire, il n'est pas tenu de verser une indemnité d'éviction au bailleur.
Loyer : montant et modalités de paiement
Le montant et les modalités de paiement du loyer sont fixés librement par les parties au contrat de location de courte durée, sans application de la règle du plafonnement des loyers.
Dans le cadre d’un bail de courte durée de nature saisonnière, il est d’usage de prévoir le paiement des loyers en une échéance unique, à la prise du local par le professionnel en début de saison.
Fin du bail précaire
Les parties s’engagent pour la durée de location prévue au bail dérogatoire. Cela signifie que le propriétaire ne peut en aucun cas donner congé avant le terme contractuel. Inversement, le locataire qui souhaite quitter les lieux de manière anticipée est tenu au paiement des échéances de loyer restant à courir.
À l’échéance du contrat, le locataire doit quitter le local commercial. À défaut, le bailleur dispose d’un délai de 1 mois pour l’y enjoindre. Si le locataire se maintient dans les lieux un mois après l'échéance du bail sans opposition du bailleur, la loi considère que les parties sont liées par un bail commercial classique.
À l’issue de la durée de location maximum de 3 ans, les parties qui concluent un nouveau bail précaire – en contradiction avec la loi – sont sanctionnées par la requalification automatique en bail soumis au statut des baux commerciaux.
Quels sont les avantages et les inconvénients du bail précaire ?
Avantages pour le locataire commerçant ou artisan
- Aucune formalité ni délai de préavis pour quitter le local ;
- Engagement sur le court terme idéal pour tester une activité, lancer une opération commerciale ou exercer une activité saisonnière.
Inconvénients pour le locataire commerçant ou artisan
- Pas de droit au renouvellement du bail ;
- Pas de plafonnement du loyer commercial en cas de renouvellement du bail.
- Pas d'indemnité d'éviction en cas de refus de renouveler le bail
Avantages pour le bailleur propriétaire du local
- Permet de récupérer rapidement les locaux ;
- Pas d’indemnité d’éviction en cas de refus de renouvellement ;
- Solution intéressante pour mieux connaître le locataire avant de s’engager sur le long terme.
Inconvénients pour le bailleur propriétaire du local
- Dans la mesure où les règles protectrices du locataire sont inapplicables, le bailleur peut avoir des difficultés à louer son local en bail dérogatoire. Le bail de courte durée peut apparaître comme moins prisé par les locataires.
Quelle est la différence entre le bail précaire et la convention d'occupation précaire ?
Le bail dérogatoire ne doit pas être confondu avec la convention d'occupation précaire.
La convention d'occupation précaire n'est pas un véritable bail. Celui qui occupe les locaux n'est pas un locataire, mais un occupant. Par ailleurs, il ne verse pas un loyer, mais une redevance.
La convention d'occupation précaire ne peut être utilisée que si des circonstances exceptionnelles rendent la conclusion d'un bail impossible. Cela peut notamment être le cas si un immeuble va être détruit sans que l'on ne connaisse la date exacte et qu'un commerçant occupe le local commercial situé dans l'immeuble en attendant. Dans ce cas de figure, les parties peuvent conclure une convention d'occupation précaire.
Il faut réunir deux conditions pour qu'une convention d'occupation précaire soit valable :
- les parties doivent justifier d'une situation objective de précarité
- La redevance que paye l'occupant doit être inférieure au prix du marché (c'est-à-dire au prix qu'il payerait normalement s'il était locataire du bail commercial).
Si l'une de ces conditions est manquante, la convention d'occupation précaire peut être requalifiée en bail commercial.
- Le bail dérogatoire déroge au bail commercial classique. Sa durée est de trois ans maximum au lieu de 9 ans minimum pour le bail commercial.
- Le locataire peut avoir intérêt à conclure un bail dérogatoire s'il veut s'engager sur une courte période.
- Les parties qui veulent conclure un bail dérogatoire doivent préciser explicitement dans le contrat qu'elles souhaitent échapper au régime de droit commun des baux commerciaux.
- Si un bail dérogatoire ne respecte pas les règles de validité
FAQ
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📌 Pourquoi parle-t-on de bail précaire ?
Le bail dérogatoire est parfois appelé bail précaire. En effet, le locataire ne peut se maintenir dans les locaux que pour une durée de trois maximum ce qui peut le placer dans une situation de précarité par rapport au preneur d'un bail commercial classique. -
Quels sont les avantages du bail dérogatoire ?
Le bail dérogatoire a plusieurs avantages par rapport au bail commercial classique :
- Il est plus court : sa durée est limitée à trois ans ;
- Le locataire ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement du bail ;
- Le preneur n'est pas obligé de verser des indemnités d'éviction.
Si le bail dérogatoire peut sembler avantager le preneur, le locataire peut y trouver son compte. Il peut notamment avoir envie de conclure un bail de courte durée pour tester le potentiel de son activité ou s'il a l'intention de déménager rapidement dans un local plus grand.
Les commentaires (1)
Bonjour, J'ai ai un litige avec mon ancienne propriétaire sur bail derogatoire, cette personne ne m'a remis aucun documents obligatoires à la signatu [...]
Bonjour, J'ai ai un litige avec mon ancienne propriétaire sur bail derogatoire, cette personne ne m'a remis aucun documents obligatoires à la signature de ce bail derogatoire. J'ai envoyer mon dossier à la conciliation des baux commerciaux qui m'a renvoyé mon dossier en m indiquant qu'un bail derogatoire n'est pas un bail commercial classique est qu ils ne peuvent pas prendre en compte ma requête. Oû dois-je m'adressé dans ce cas pour ce contentieux . Pouvez-vous vous m'en dire plus. Cordialement Mme HADJAZ
Voir plusmoinsBonjour, merci pour votre commentaire ! Les litiges relatifs aux baux dérogatoires relèvent de la compétence du tribunal de commerce. Excellente journ [...]
Bonjour, merci pour votre commentaire ! Les litiges relatifs aux baux dérogatoires relèvent de la compétence du tribunal de commerce. Excellente journée !
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