Vous envisagez une rupture conventionnelle avec l’un de vos salariés protégés. Il faut savoir que le salarié protégé bénéficie au regard de la loi d’un statut spécial qui impose de suivre un formalisme particulier. Il vous faut alors respecter deux étapes spécifiques, qui ne sont surtout pas à négliger. Zoom sur la rupture conventionnelle d'un salarié protégé :
Qui sont les salariés protégés ?
En raison de la sensibilité de leur mission professionnelle, certains salariés bénéficient de par la loi d’une protection spéciale, pour éviter qu’ils ne fassent l’objet de représailles de leur employeur suite aux actions qu’ils ont pu mener, ou de pressions.
Sont visés :
- Les conseillers prud’homaux ;
- Les représentants du personnel au sein du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), désormais inclus au sein du Comité Social et Economique (CSE) ;
- Les membres du Comité d’entreprise (CE), également fusionnés au sein du CSE ;
- Les délégués du personnel, inclus au sein du nouveau CSE ;
- Les délégués syndicaux.
Cette protection spéciale court pendant toute la durée de leur mandat et perdure en fonction de celui-ci, de 6 mois à 1 an après la fin des fonctions. Cette protection spéciale a une valeur constitutionnelle.
Qu’est-ce que la rupture conventionnelle ?
Pour vous séparer d’un salarié en CDI à l’amiable, vous pouvez recourir à la rupture conventionnelle. En effet, la rupture conventionnelle vise à convenir ensemble des modalités de rupture du contrat de travail qui vous lie. Toutefois, cela impose le respect de certaines conditions et le versement d’une indemnité.
Peu importe que votre salarié soit protégé ou non, la rupture conventionnelle est toujours possible à condition qu’il soit en CDI. Néanmoins, il convient de respecter un critère indispensable : l’accord commun entre votre salarié et vous. À ce titre, vous ne pouvez pas lui imposer la rupture conventionnelle et réciproquement. Par ailleurs, la rupture conventionnelle peut intervenir à n’importe quel moment, et ce, même si une procédure de licenciement est en cours.
Dans certains cas, vous ne pouvez pas recourir à la rupture conventionnelle. C’est le cas lorsque :
- Il existe un vice du consentement ;
- Votre salarié fait l’objet d’une inaptitude au travail, constatée par un médecin ;
- Elle est proposée dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, d’un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et compétences ou portant rupture conventionnelle collective ;
- Elle vise à contourner les garanties en matière de licenciement économique.
La rupture conventionnelle doit suivre un certain formalisme (convocation à un ou plusieurs entretiens, le salarié doit être assisté, une convention de rupture doit être rédigée et un exemplaire doit être remis au salarié). Un délai de rétractation court ensuite, pendant lequel les deux parties peuvent revenir sur leur engagement. La procédure diffère quelque peu lorsque vous souhaitez conclure un tel accord avec un salarié protégé, car vous devez obtenir au préalable certaines autorisations.
Quelles autorisations devez-vous obtenir pour conclure une rupture conventionnelle avec un salarié protégé ?
La consultation du CE ou du CSE avant la signature de la convention de rupture
À l’issue des entretiens avec votre salarié, vous avez déterminé les conditions de rupture conventionnelle du contrat de travail et notamment le montant des indemnités conventionnelles de départ. Mais avant de signer, vous devez obtenir l’avis du CE, ou s’il a déjà été mis en place comme le prévoient les ordonnances Macron, du Comité Social Économique (CSE).
Il faut également remplir un formulaire d’autorisation spécifique (Cerfa N° 14599*01), que vous adresserez à l’inspecteur du travail (et non à la Direccte, comme c’est le cas pour la rupture conventionnelle d’un salarié non protégé).
Celui-ci comporte une mention relative à la date de consultation des représentants du personnel. Pensez bien à la remplir ! Le formulaire devra être accompagné du procès-verbal de la réunion où l’avis du CE ou du CSE a été recueilli. Cette formalité marque ainsi le point de départ du délai de rétractation de 15 jours.
L’autorisation de l’inspecteur du travail
Vous ne devez pas obtenir l’homologation de la Direccte comme c'est le cas pour un salarié non protégé, mais l’autorisation de l’inspecteur du travail. Celui-ci va ensuite procéder à une enquête contradictoire et votre salarié peut demander à être assisté par un représentant de son syndicat.
L’inspecteur du travail dispose en principe d’un délai là encore de 2 mois pour se prononcer sur la demande de rupture conventionnelle après l’enquête. Si vous ne recevez aucune réponse dans les deux mois, votre demande est réputée avoir été rejetée.
Si l'inspecteur du travail accepte la demande, la rupture effective du contrat de travail n’est autorisée qu’à partir du lendemain du jour où a été donné cet accord.
Que va vérifier l’inspecteur du travail ?
L'inspecteur du travail va dans un premier temps s’assurer que la liberté de consentement a bien été respectée pour chacune des parties. Ensuite, il va vérifier si toutes les phases de la procédure ont bien été respectées (tenue d’au moins un entretien, respect des règles relatives à la possibilité de se faire assister, signature de la convention) et que toutes les mentions sont bien portées (ancienneté du salarié, montant de l’indemnité de rupture, qui ne peut être inférieure au montant de l’indemnité légale de licenciement). Par ailleurs, il déterminera si le motif invoqué est ou non lié au mandat du salarié protégé. L’inspecteur vérifiera également que l’avis du CE ou du CSE a bien été recueilli.
Les conséquences du non-respect de la procédure
Veillez à bien vous soumettre à chaque étape de la procédure. En effet, si l’une manque (signature sur l’imprimé Cerfa, entretien, calcul de l’indemnité, assistance, non consultation du CE ou du CSE, absence d’autorisation de l’inspecteur du travail, respect des délais, envoi des formulaires…), les conséquences peuvent être graves. Vous risquez effectivement :
- Le refus d’autorisation de la rupture conventionnelle ;
- La requalification de l’accord en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui peut entraîner le versement d’indemnités très lourdes au salarié.
Ne négligez donc rien et procédez à plusieurs vérifications plutôt qu’une !